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Paris accueille le Davos asiatique

2 octobre 2017

C’est à Paris que s’est tenu le 15 septembre un sommet sino-européen exceptionnel sur le projet « Une ceinture, une route », connu aussi sous le nom des Nouvelles Routes de la soie (NRS).

Co-organisé par le Forum BOAO pour l’Asie (le Davos asiatique) et la Fondation prospective et innovation présidée par l’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin, ce sommet auquel ont participé quelques trois cents acteurs avait pour mission d’expliquer les enjeux de ce projet audacieux entrepris par la Chine et s’est conclu avec la visite à l’Elysée d’une délégation, menée par M. Raffarin, pour une rencontre avec le Président de la République.

Soutenue par les autorités chinoises et françaises, cette rencontre s’inscrivait dans la suite du Forum « Une ceinture, une route » des 14-15 mai derniers, qui avait rassemblé à Beijing les chefs d’état et de gouvernement de plus de vingt-huit nations.

M. Peiyan Zeng, ancien vice-premier ministre de la République populaire de Chine et vice-président du forum BOAO pour l’Asie et, du côté français, Jean Pierre Raffarin et Gérard Larcher, président du Sénat ont prononcé les discours d’introduction.

M. Raffarin a rappelé les convergences qui se dessinent entre France, Europe et Chine : un protocole d’accord signé par le Fonds de la Route de la Soie (FRS) et le Fonds européen d’investissement (FEI) pour investir, dans le cadre du Plan Junker, 500 millions d’euros dans du capital-investment à destination exclusive des PME en Europe ; la volonté aussi de la Chine de contribuer à la paix et à la stabilité notamment dans la péninsule coréenne, ainsi que de déployer des soldats dans des opérations de maintien de la paix. La question clé est, a-t-il souligné, l’attachement de la France et de la Chine au multilatéralisme.

Appelant l’Europe, dans entretien donné à Xinhua le jour même, a « prendre au sérieux ce projet historique (...) et à ne pas avoir peur de la discussion » il a également plaidé auprès des participants au forum pour de véritables relations de confiance dans une vision « gagnante-gagnante » et à « défendre cette idée à l’intérieur du processus et non à la discuter à l’extérieur car nous perdrions beaucoup de temps. La France et les autres pays ont besoin de croissance rapide, c’est pour cela que je suis favorable à un engagement franc, rapide à l’intérieur du processus pour discuter. »

Soulignant la nécessité « d’approches concertées » où l’UE « s’approprierait » le projet, Gérard Larcher a, de son côté, proposé des méthodes nouvelles, pour clarifier les conditions d’investissement, l’ouverture des marchés, la qualité de la production, l’éthique de co-développement et les conditions du respect mutuel. « La Chine et l’Union européenne, notamment la France, disposent d’instruments puissants en faveur du co-développement qui peuvent accompagner des stratégies d’investissements » a-t-il déclaré à Xinhua.

Les propos introductifs de M. Peiyan Zeng, ancien vice-premier ministre de la République populaire de Chine ont permis de clarifier certains points, sources d’inquiétude dans les pays occidentaux. En effet, il s’agit d’un projet de coopération et en aucun cas d’une velléité de domination. Les Nouvelles routes de la soie, c’est pour le progrès de toute l’humanité, a-t-il expliqué. Car plus il y a des communications, plus il y a de prospérité.

Un dicton chinois dit « Si tu veux t’enrichir, construis une route. »

‘La ceinture et la route’ contribue non seulement à la prospérité économique durable du continent eurasiatique, mais aide aussi à répondre aux risques géopolitiques comme la crise des réfugiés et le terrorisme et à promouvoir la paix et la stabilité sur le continent tout entier.

Cette initiative est eurasiatique, mais aussi eurafricaine.

M. Zeng a tenu à rappeler également que la Ceinture et la Route a été lancée par le Président Xi Jinping dans la période post-crise financière internationale, afin « d’explorer de nouveaux moteurs de croissance de l’économie mondiale, d’assurer un développement équilibré et inclusif et de réduire l’écart entre riches et pauvres. (…) Elle n’est pas un outil géopolitique ni un plan d’aide, mais une plateforme de coopération pragmatique et une initiative pour un développement interconnecté, qui vise à créer de nouvelles opportunités pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies », a-t-il poursuivi.

Trois tables rondes se sont déroulées dans la journée, la première consacrée aux infrastructures, la deuxième aux échanges et aux investissements, la troisième aux modes de financement innovants qui permettront de financer les très grands projets de « La Ceinture et la Route ».

Notons, parmi les orateurs de la première table ronde sur les infrastructures, M. Sun Ziyu, vice-président de la China Communication Construction Company (CCCC), première compagnie d’infrastructure de transport chinoise agissant aussi à l’internationale et M. Wang An, Président et dirigeant du Parti, de la China International Engineering Consulting Corporation (CIECC), l’homme qui donne le feu vert à tous les projets d’infrastructures engagés par la Chine à l’international.

A pris la parole aussi dans ce panel Stéphane Aver, PDG d’AAqius, société suisse agissant dans le domaine de la transition énergétique, notamment dans la fourniture de capsules d’hydrogène stockées sans pression pour alimenter des petits véhicules électriques (scooters, vélos, triporteurs, etc.).

AAqius a même signé jeudi, en marge du sommet, un important contrat avec le distributeur de carburants chinois Censtar, visant à lancer 100 000 véhicules électriques dans la zone économique de Jiangbei avant son extension à l’échelle nationale.

La deuxième table ronde, sur les échanges et les investissements, a donné la parole au président du géant chinois China Investment Corporation (CIC), ainsi que Jusuf Wanadi, co-fondateur du Centre stratégique pour les études internationales.

La dernière table ronde, et pas la moins importante, celle sur la recherche des financements innovants pour financer les projets de « La Ceinture et la Route », a montré que cette recherche n’en est qu’à ses débuts.

Parmi les intervenants, M. Shaukat Aziz , ancien premier ministre du Pakistan et membre du Comité d’administration du BOAO pour l’Asie, Enzo Quattrociocche, secrétaire général de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, Shi Wenchao, président de la China Union Pay Co et David Wright, vice-président de la Barclays et Jean-Charles Simon, gérant associé de Simon Associés.

Plusieurs orateurs ont souligné combien le développement des infrastructures joue un rôle fondamental. M. Zeng, le premier, a rappelé que s’il s’agit là de projets peu rentables à court terme leur productivité s’avère considérable dans le long terme et ne peut être mesure que dans le contexte d’une région entière. M. Aziz a aussi souligné le rôle d’intermédiaire joué par les infrastructures évoquant le cas d’une ville hypothétique A qui n’a aucune relation avec une autre ville hypothétique B, et pour lesquelles la construction d’une autoroute les liant est la condition préalable à tout échange commercial ou développement productif.

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