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Myrotvorest, « Centre de lutte contre la désinformation » et assassinat de Daria Douguine

29 août 2022

L’Institut Schiller a montré de manière répétée ce qui était à l’œuvre en Ukraine depuis le coup d’Etat de la place Maidan en 2014. Aujourd’hui, l’idéologie néo-nazie des promoteurs et acteurs de ce coup d’Etat ne fait plus aucun doute. Les « listes noires » que commencent à édicter des organismes directement liés au gouvernement ukrainien, en sont une nouvelle preuve.

L‘assassinat le 20 août, près de Moscou, de la fille de l’idéologue russe Alexandre Douguine dans l’explosion de sa voiture piégée, a marqué un tournant. Il s’agit en effet du meurtre d’une personnalité civile, non loin du centre de la capitale russe.

La plupart des médias occidentaux ont avancé comme mobile du meurtre le fait qu’Alexandre Douguine, le père de Daria, serait « le cerveau de Poutine » ou son « grand idéologue ». Mais cette affirmation commode est fausse et vise surtout à faire croire que le Président russe endosse les vues ultra-nationalistes et radicales de Douguine sur un « Grand Espace russe » et donc d’un expansionnisme territorial.

Si elle ne correspond pas à la réalité, il est toutefois à craindre, comme plusieurs médias en ont fait l’hypothèse (Le Monde, France 24) que la pression des ultra-nationalistes contre Vladimir Poutine, qui lui reprochaient d’être trop faible face aux pays occidentaux, se renforcera fortement.

En tout état de cause, cet assassinat ne marque pas seulement un tournant dans la guerre par procuration de l’OTAN contre la Russie, il met en lumière l’appareil de propagande et de terreur destiné à faire taire toute mise en cause du narratif ukrainien sous contrôle de l’OTAN.

Le 22 août, le Service fédéral de sécurité russe (FSB) a annoncé que l’attentat à la voiture piégée avait été conçu par les services spéciaux ukrainiens et perpétré par une ressortissante ukrainienne, Natalia Vovk, qui s’est réfugiée ensuite en Estonie. Le lendemain, le ministre russe des Affaires étrangères, Serguei Lavrov, précisait que « le FSB a établi les faits, qui font actuellement l’objet d’une enquête ». De son côté, le gouvernement ukrainien niait toute responsabilité dans cet assassinat et, depuis Washington, le porte-parole du département d’État, Ned Price, déclarait que les États-Unis condamnent tout attentat contre des civils, tout en renvoyant à la réponse officielle de Kiev.

La liste noire

La mise en place d’une politique de terreur est une réalité dont des représentants et des orateurs de l’Institut Schiller, ainsi que d’autres personnalités, ont déjà eu à connaître, comme nous l’avons documenté le 3 août avec notre communiqué sur la « Liste noire » ukrainienne publiée par le Centre de lutte contre la désinformation (CCD) (relevant Conseil de sécurité nationale et de défense de l’Ukraine), où des personnalités occidentales sont pointées du doigt simplement pour leur défense d’une solution diplomatique plutôt qu’une escalade des hostilités. Cette liste noire publiée par le CCD le 14 juillet, désigne plus de 70 journalistes, universitaires, hommes politiques, militaires et autres professionnels de 22 pays comme des « propagandistes du Kremlin », et menace donc gravement la sécurité personnelle des personnes qui y figurent.

D’autre part, au moins quatre personnes de l’Institut Schiller ou intervenant dans les conférences de celui-ci figurent dans le site Myrotvorets (Le Pacificateur [sic]). Il s’agit de la présidente et fondatrice de l’Institut Schiller Helga Zepp-LaRouche, de porte-parole de The LaRouche Organization Harley Schlanger, l’ancien analyste de la CIA Ray McGovern et l’ancienne membre du Congrès Tulsi Gabbard.

On comprendra la portée de cette présence sur ce site si l’on considère le document présenté le 23 août par l’ambassadeur russe aux Nations unies Vassily Nebenzia. Tiré du site Myrotvorets, qui recense depuis 2014 des milliers d’« ennemis de l’État » - russes comme ukrainiens - il s’agit d’une photo de Daria Douguine barrée en diagonale du mot « liquidée ».

Le message, limpide, devrait à minima se traduire par une interdiction d’un site qui incite à des crimes haineux contre quiconque fait entendre une voix ne s’alignant pas sur l’idéologie professée par celui-ci. Myrotvorets, tristement connu dans le monde entier pour ses agissements (voir l’exposé de l’hebdomadaire l’Executive Intelligence Review ), cite explicitement sur son site Internet le rôle du CCD dans le choix de ses cibles.

Il est donc de l’intérêt de tous qu’une action internationale rapide et décisive soit lancée pour forcer la fermeture du Center for Countering Disinformation (Centre de lutte contre la désinformation - CCD) qui n’hésite pas à présenter le régiment néo-nazi Azov comme « le symbole de la lutte ukrainienne » pour unifier la société ukrainienne autour de la « haine de la Russie ». Les Azov sont les « gardiens de la paix », professent-ils. Les personnalités internationales qui discutent des possibilités de mettre rapidement fin au conflit entre l’Ukraine et la Russie, en recourant à la diplomatie pour rechercher des négociations au lieu de recourir à davantage d’armes, ou qui affirment que l’Ukraine ne peut pas et ne doit pas écraser militairement la Russie, ou qui expriment leur inquiétude quant au fait que toute tentative en ce sens pourrait conduire à une guerre nucléaire mondiale et à la fin de l’espèce humaine, sont coupables de « crimes de guerre » et méritent d’être éliminées, écrit le CCD. Ces « propagandistes du Kremlin » doivent être déclarés « terroristes de l’information » et faire l’objet de sanctions internationales et d’un procès pour crime de guerre, demandent-ils.

Opération ukrainienne ?

Il serait toutefois erroné de parler d’un « ministère de la Vérité » de l’Ukraine, car celui-ci est plutôt rattaché à l’OTAN. Le CCD est en effet une création à part entière des gouvernements des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’OTAN (avec l’Union européenne qui les suit consciencieusement). Le CCD a été créé à leur instigation. Il est financé et étroitement conseillé par le Département d’État américain, les services de renseignement britanniques et l’OTAN dans chacune de ses démarches. La responsabilité des frappes du CCD/Myrotvorets, tant celles qui ont eu lieu que celles qui pourraient se produire, incombe tout autant à ces parrains internationaux.

Les récents propos de l’ambassadeur d’Ukraine au Kazakhstan, Pavel Vrublevsky suite à l’assassinat de Daria Douguine, cités par Vassily Nebenzia, donnent un sens de l’urgence : « Nous essayons d’en tuer le plus possible. Plus nous tuons de Russes maintenant, moins nos enfants auront à en tuer. C’est tout. » Comme l’a souligné Nebenzia, « ce sont les mots de l’ambassadeur du pays où ces mêmes « Russes » non seulement vivent, mais constituent aussi une partie très importante de la population. Un tel pays, un tel régime inhumain, ont-ils un avenir ? Nos collègues occidentaux peuvent prolonger son agonie mais ne peuvent pas empêcher sa disparition. »

Sergey Glazyev, un ancien conseiller principal du président Poutine qui dirige aujourd’hui la planification économique de l’Union économique eurasienne, a cité Andrii Yermak, le chef du bureau présidentiel de Volodymyr Zelensky à Kiev : « Notre tâche est de faire en sorte que non seulement la génération actuelle de Russes, mais aussi leurs enfants et petits-enfants, paient. » Glazyev a ajouté : « Huit heures plus tard, la fille d’Alexandre Douguine, Daria, a été tuée..... Si l’on considère que le SBU et l’administration Zelensky sont, en fait, des sous-branches de la CIA et du MI6, cet assassinat odieux commis par leurs agents a pour but évident de faire monter en puissance la guerre ... Cet assassinat a rendu impossible les négociations que [le président turc Recep Tayyip] Erdoğan recherche et que le premier ministre israélien propose. Avec leurs crimes provocateurs contre l’humanité et le monde russe, les agences de renseignement américaines et britanniques exacerbent, étendent et approfondissent le conflit avec l’aide du SBU [Service de sécurité de l’Ukraine] afin d’intensifier les hostilités, avec de nombreuses victimes. La réponse à ces crimes ne peut être qu’une mobilisation rapide et décisive de toutes les forces du monde russe pour une victoire rapide en Ukraine et dans la guerre hybride mondiale déclenchée contre nous par Washington et ses satellites. »


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