« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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Coalition internationale pour la paix
Cultiver un haut niveau de droit
8 mars 2025
Intervention de Jérôme Ravenet lors de la 91ème réunion de la Coalition internationale pour la paix.
A l’heure où les pays occidentaux se font une vertu d’être dans le déni de l’autre - réduit au statut d’« ami » ou d’« ennemi » - où ils exhibent leur incapacité à accueillir tout dialogue honnête, le « multiperspectivisme » proposé par Jérôme Ravenet est l’alternative qui s’impose pour sortir de cette prison de la pensée. C’est d’autant plus nécessaire pour les pays occidentaux, et la France en premier, qu’il y a urgence à ce qu’ils redéfinissent des relations internationales à même de garantir le bien commun le plus précieux : la paix.
Lors de cette réunion, le 28 février, Mme Zepp-LaRouche a ouvert la séance en évoquant les bouleversements tectoniques en cours, notamment depuis l’élection de Trump. Le monde unipolaire dirigé par les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux depuis la fin de l’Union soviétique, se désintègre et « ne sera plus jamais restauré ». Elle s’en est prise au « déni de réalité » des dirigeants européens, qui refusent d’admettre que leur guerre en Ukraine est perdue. Ils se préparent donc à une guerre qu’ils n’ont ni les moyens de mener, ni de gagner.
C’est un symptôme de cette « arrogance du pouvoir », conséquence de l’adoption du Traité de Lisbonne en 2007, a expliqué Helga Zepp-LaRouche.
Elle a rappelé comment ce traité avait été imposé en catimini par les dirigeants de l’UE, bafouant le vote des citoyens français et hollandais en 2005 contre le projet de Constitution européenne, version initiale de ce traité. Or, le Traité de Lisbonne contient tout ce qu’il faut pour embarquer l’UE dans une action militaire de l’OTAN. Son article 42, paragraphe 7, stipule en effet :
Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir,
Le paragraphe 2 du même article précise que :
la politique de l’Union (…) respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre.
La fondatrice de la CIP a également souligné l’importance de la déclaration faite par le président Vladimir Poutine le 27 février, alors qu’il s’adressait au FSB (service de sécurité russe). L’objectif, leur a-t-il dit, doit être de créer une nouvelle architecture de défense en Europe et dans le monde, assurant la sécurité à tous les pays. Mme LaRouche y voit un écho à la nouvelle architecture de paix et de développement économique internationale proposée par l’Institut Schiller, basée sur ces « dix principes d’une nouvelle architecture de sécurité et de développement » qu’elle a elle-même élaborés.
Puissance versus pouvoir
C’est dans ce contexte que l’intervention de Jérôme Ravenet, professeur de philosophie aux universités de Paris VII et Paris X et auteur d’une thèse sur le président chinois Xi Jinping, a suscité un débat de fond entre orateurs et participants sur la nécessité de clarifier l’opposition entre les deux mots pouvoir et puissance, souvent utilisés à tort comme voulant dire la même chose.
Jérôme Ravenet rappela d’abord l’origine de cet univers de guerres sans fin :
« Il s’agit du discours de Tony Blair tenu à Chicago en 1999, devenu la triste boussole de l’OTAN et de notre classe dirigeante européiste, pour justifier par un habile sophisme la défense de valeurs qui sont ouvertement guerrières. Le sophisme consiste à dénoncer comme dangereux, non pas celui qui les menaceraient, mais celui qui ose refuser leur hégémonie. Ces jugements visent essentiellement les interlocuteurs russes et chinois, désignés comme adversaires, voire comme des ennemis vitaux. « De la deuxième guerre d’Irak à la guerre d’Ukraine en passant par celle de Libye, ils se sont donné le privilège d’intervenir sous diverses formes sans résolution de l’ONU, c’est-à-dire de contourner le Droit international. « Il va sans dire qu’ils sont convaincus d’avoir raison et d’être la raison. Mais quand on joue à ‘qui a raison ?’, quand on veut persuader ses interlocuteurs qu’ils ont tort et qu’on les diabolise, quand on les désigne comme des adversaires qu’il faut absolument soumettre, quand on conçoit donc la relation à l’autre essentiellement comme relation de pouvoir ou de domination, on n’augmente pas les chances collectives d’aboutir à une paix commune. On ne doit pas ignorer qu’on intensifie nécessairement ou qu’on aggrave les conflits, on ne les résout pas. « La question qui se pose est donc : ceux qui font le choix de cette méthode ignorent-ils que leur attitude est toxique et contre-productive ? (...) Ou bien sont-ils fanatiquement convaincus par les pouvoirs militaro-financiers qui fondent leur pouvoir, qu’au nom de leurs ‘valeurs’ universelles, ils sont les gardiens d’une guerre juste contre le Mal ? (…) « Mais désormais tout a changé (…). S’il avait été possible de régner sur le monde sans y rencontrer aucune contradiction, comme un certain Fukuyama l’avait rêvé en 1992 après l’effondrement du régime soviétique, l’Histoire aurait sans doute été finie. Mais ce n’est pas ce qui est arrivé. Inutile de refaire ici l’historique largement connu de la manipulation des révolutions colorées, des mensonges de Colin Powell, des guerres ‘justes’ de l’OTAN, présent jusque dans l’océan Pacifique, ou du sauvetage en l’état du système bancaire en 2008. Le diagnostic est entendu : en s’exonérant des règles qu’elle imposait aux autres, la puissance de l’Occident global a démonétisé l’Ordre fondé sur des règles (Based Rules Order) et s’est affaiblie en un simple pouvoir. »
C’est là que la différence entre les mots puissance et pouvoir trouve son sens, poursuit Jérôme Ravenet. Qu’est-ce que cela signifie ?
« Ce qui caractérise une puissance stricto sensu - comme l’expliquait en substance le philosophe Baruch Spinoza dans son Ethique (Partie I, proposition 11) - c’est une force d’exister, une capacité à ‘composer’, à maintenir dans l’unité d’une ‘notion commune’ les termes divers ou adverses d’une contradiction. « Potentia posse existere. Exister, positivement, c’est exercer cette puissance, c’est tenir les contradictions dans la composition ou la communauté d’une unité supérieure. Le pouvoir, au contraire, est une force qui manque de puissance, une force impuissante parce qu’elle veut, non pas surmonter la contradiction, mais la supprimer. « Un événement majeur, contemporain de Spinoza (mais dont il n’a pas parlé), a illustré sa théorie de la puissance et des notions communes : c’est la conclusion des Traités de Westphalie, en 1648, qui mirent fin à trente ans de guerres fratricides intra-européennes. Tandis que le pouvoir s’érode à vouloir empêcher et contraindre, à lutter ou éliminer les contradictions, la puissance s’efforce de négocier pour intégrer, d’unir et de composer les contradictions. « Leurs stratégies sont opposées : celle du pouvoir est exclusive, celle de la puissance est inclusiviste ou intégrative. « En choisissant de désigner les pays leaders des BRICS comme des ennemis, les classes savantes et dirigeantes européennes ont fait le choix de la première stratégie, c’est-à-dire le choix du rapport de pouvoir. Elles l’ont fait contre la Russie post-soviétique en avançant les troupes de l’OTAN vers l’Est, et de façon récurrente, contre la Chine, sinon depuis les guerres de l’opium et les ‘Traités inégaux’ (1840-42), du moins depuis l’arrivée de Deng Xiaoping (1978). Ce choix du pouvoir, contre celui de la puissance, est l’aveu de leur impuissance.
Le remède pour l’Europe découle de ce diagnostic, selon Jérôme Ravenet. « Elever le niveau de l’Etat de Droit » devrait donc passer par une réflexion des classes dirigeantes et intellectuelles européennes sur les moyens d’accroître la puissance collective, soigneusement distinguée des moyens du pouvoir, qui sont le plus souvent des moyens impuissants (ainsi que le démontre en général l’inefficacité des trains de sanctions).
Jérôme Ravenet conclut en souhaitant que « cette distinction entre pouvoir et puissance qui me semble essentielle pour éviter les errements de la géopolitique, essentielle pour la paix mondiale, (…) trouve un écho dans la réflexion des juristes ».
Il attira l’attention sur « l’un des symptômes morbides de la rhétorique savante occidentale du pouvoir. Ce symptôme, c’est le déni ou le refus de reconnaître à la Chine socialiste la dignité même d’un interlocuteur politique, puisque nos universitaires, jusqu’au Collège de France, la dénoncent comme tyrannie, despotisme, voire comme totalitarisme », plaidant en faveur du concept de « démocratie consultative » à la chinoise, comparée à notre « démocratie représentative » occidentale. Démocratie occidentale ?
Rebondissant sur la présentation « éclairée » de M. Ravenet, Helga Zepp-LaRouche reconnut que le concept chinois de « démocratie consultative » était une meilleure approche.
« En Europe, la démocratie est morte », comme en témoigne l’annulation des élections présidentielles en Roumanie parce que le vainqueur était opposé à la guerre en Ukraine, suivie de son inculpation sous des accusations fallacieuses et, enfin, de son arrestation pour l’empêcher de se présenter à nouveau.
L’Europe est liée à « l’État profond » qui contrôle les États-Unis, a dénoncé Mme LaRouche. C’est la notion de synarchie, l’idée que l’oligarchie et les intérêts bancaires doivent prévaloir sur la volonté du peuple, donnant en exemple l’ancienne secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton, qui qualifiait ce peuple de « déplorable », tandis qu’en France, François Hollande les appelaient « les sans-dents ».
Ray McGovern, l’un des fondateurs des VIPS (Vétérans du renseignement américain pour le retour à la raison), qui était intervenu au début de la réunion, a vivement remercié Jérôme Ravenet. « On retrouve la différence entre pouvoir et puissance dans la Bible, avec Judas contre Jésus » a-t-il observé. Enthousiasmé à l’idée de se remettre à la philosophie, il a rappelé qu’ayant étudié les classiques et le grec, il avait découvert qu’il existait aussi deux mots pour désigner le pouvoir : Kratos, ou hégémonie, et Dynamis, désignant, selon le contexte, la potentialité, la puissance ou encore l’énergie, et prenant en compte la dimension de « l’autre ».
A propos du racisme anti-chinois
A ce sujet, Jérôme Ravenet rappela que c’est le philosophe français Montesquieu qui avait introduit la notion de « despotisme oriental » :
« Bien que ne connaissant pas la Chine, [c’était] un jugement principalement motivé par son animosité envers les Jésuites, qu’il considérait comme constituant une vaste machine de prise de pouvoir et qu’il estimait avoir trop d’ascendant sur Louis XIV. Les Jésuites (avec lesquels le philosophe protestant Gottfried Leibniz entretenait une correspondance suivie) étant au cœur des échanges entre l’Europe et la Chine, il convenait de présenter cette dernière sous un jour défavorable. »
A l’opposé de cette conception dictée par des motifs politiques, Jérôme Ravenet montra comment Montaigne « avait mis en garde contre ce qu’il appelait dans ses Essais, la ‘présomption’, c’est-à-dire la prétention d’avoir le monopole de la vérité. A l’aube de cette longue crise de la culture européenne qu’inauguraient les fanatismes du XVIème siècle (une crise qui n’en finit manifestement pas), Montaigne alertait sur la tentation d’absolutiser son point de vue particulier, de combattre la différence comme une erreur et l’erreur comme un crime : quand cette ’présomption’ embrase le personnel intellectuel et politique, sa contagion fanatique enflamme le corps social de fantasmes mortels. »
Pour ce qui est de la Chine, Jérôme Ravenet ne dit pas « qu’il faut croire sur parole qu’elle en est une [démocratie] et l’encenser comme telle », mais préfère reformuler sa question du début : « Est-ce que traiter nos interlocuteurs chinois par le déni ou le mépris augmente ou diminue nos chances de les rencontrer sur le terrain d’un dialogue fructueux ? La question contient sa réponse. »
En conclusion, « c’est donc par un hommage à ces philosophes que j’aimerais clore cette présente contribution, sorte de ‘manifeste’ en faveur du multi-perspectivisme, c’est-à-dire de la confrontation raisonnée de points de vue contradictoires ».
L’histoire de l’Europe peut se lire, avec Montaigne, Bodin, Leibniz, Spinoza et quelques autres, comme un long combat contre la tentation de cet universalisme hégémonique qui est la face sombre de notre modernité : l’hégémonisme des ligueurs contre les protestants pendant les guerres de Religion, celui des colons européens contre les indigènes d’Amérique, de l’Orient et de l’Extrême-Orient dans les siècles suivants, jusqu’à celui de la doctrine Wolfowitz - tout cela est la matière noire qu’une alchimie du bon sens et de la raison peut se donner l’objectif de transmuter en lumière. A cet universalisme unipolaire ou hégémoniste, à sa pratique décomplexée du deux poids deux mesures et aux violences militaires qu’elle appelle, on peut essayer de répondre par un retour au bon sens historique, c’est-à-dire par une réflexion qui facilite le retour ou l’accouchement de ce monde multipolaire.
« Philosophiquement, cela suppose de comprendre que les contradictions n’y sont pas nécessairement synonymes de rivalité et de rapports de force, mais aussi de conciliation, d’équilibre, d’harmonie. Cela suppose de comprendre que, contrairement à ce qu’a dit le Premier ministre britannique Starmer, tout a changé, parce que, comme l’analysait déjà Héraclite, on est dans le polemos, c’est-à-dire le conflit, la contradiction qui fait que tout coule, que tout change dans le monde à chaque instant. Et le défi pour l’intelligence n’est pas de supprimer ou d’anéantir ces contradictions mais de les faire jouer dialectiquement, comme le préconisait Nicolas de Cues. Tel est le sens de la “coïncidence des opposés” - que Montaigne connaissait aussi et qu’il exerce activement tout au long des Essais. « C’est à ce défi de l’intelligence que nous invitent encore les pays du Sud global et leur principe des accords gagnant-gagnant, ou que nous invitait déjà, un peu avant, ici même, la ‘Troisième Voie’ du Général de Gaulle ‘entre libéralisme et communisme’. « Tel est, en conclusion, le diagnostic des humeurs pessimistes et guerrières qui assombrissent encore l’Europe, mais sur lequel les bonnes volontés peuvent fonder un pronostic optimiste. »
Le discours de Tony Blair à Chicago en 1999 est devenu la triste boussole de notre classe dirigeante européiste, justifiant par un habile sophisme la défense de valeurs qui sont ouvertement guerrières. Le sophisme consiste à qualifier de dangereux non pas celui qui les menacerait, mais celui qui ose refuser leur hégémonie. Ce discours est mis en oeuvre par une méthode qui se borne à une avalanche de jugements péjoratifs qui va jusqu’à la reductio ad hitlerum. Ces jugements visent essentiellement les interlocuteurs russes et chinois, désignés comme adversaires, voire comme des ennemis vitaux. La Chine est toujours présentée dans la doctrine officielle de l’UE comme “un partenaire économique et un rival systémique”. Et rappelons que, désormais à contre-courant des négociations de paix, l’UE surenchérit cette semaine contre la Russie par un 16ème train de sanctions.
Il va sans dire qu’ils sont convaincus d’avoir raison et d’être la raison. Mais quand on joue à “who’s right ?”, quand on veut persuader ses interlocuteurs qu’ils ont tort, et qu’on les diabolise, quand on les désigne comme des adversaires qu’il faut absolument soumettre, quand on conçoit donc la relation à l’autre essentiellement comme relation de pouvoir ou de domination, on n’augmente pas les chances collectives d’aboutir à une paix commune. Au contraire, on entretient les clivages et on alimente le manichéisme : d’une façon contre-productive, les accusations et condamnations augmentent le risque de conflit parce qu’elles obligent l’autre à se défendre, à déclencher des mécanismes naturels de défense agressive qui vont entretenir la rivalité. Bref, quand on joue à “who’s right ?”, on ne peut pas ignorer et en tous cas, on ne doit pas ignorer qu’on intensifie nécessairement ou qu’on agrave les conflits. On ne les résout pas.
La question qui se pose est donc : ceux qui font le choix de cette méthode ignorent-ils que leur attitude est toxique et contre-productive ? Sont-ils simplement naïfs et immatures ? C’est possible. Ou bien sont-ils fanatiquement convaincus par les pouvoirs militaro-financiers qui fondent leur pouvoir, qu’au nom de leurs “valeurs” universelles, ils sont les gardiens d’une guerre juste contre le Mal ?
Quand, à la fin de la IIème Guerre Mondiale, les féodalités financières servies par l’OTAN ont établi leur puissance jusqu’à l’hyperpuissance, elles se sont donné le droit de désigner l’ennemi, unilatéralement s’il le fallait, c’est-à-dire en s’exonérant des bénédictions de l’ONU. De la IIème guerre d’Irak à la guerre d’Ukraine, en passant par celle de Lybie, elles se sont donné le privilège d’intervenir sous diverses formes sans résolution de l’ONU, c’est-à-dire de contourner le Droit international. Mais désormais “tout a changé”, comme le découvre amèrement le Premier Ministre Britannique (Starmer), non seulement parce que “tout change” - Panta rhei (Πάντα ῥεῖ / Pánta rheî) - comme le proclamait philosophiquement Héraclite, mais parce que les abus de pouvoir de l’Occident global ont usé sa puissance à vitesse accélérée. S’il avait été possible de régner sur le monde sans y rencontrer aucune contradiction, comme un certain Fukuyama l’avait rêvé en 1992 après l’effondrement du régime soviétique, l’Histoire aurait sans doute été finie. Mais ce n’est pas ce qui est arrivé. Inutile de refaire ici l’historique largement connu de la manipulation des révolutions colorées, des mensonges de Colin Powell, des guerres “justes” de l’OTAN présent jusque dans l’Océan Pacifique, ou du sauvetage en l’état du système bancaire en 2008. Le diagnostic est entendu : en s’exonérant des Règles qu’elle imposait aux autres, la puissance de l’Occident global a démonétisé l’Ordre fondé sur des Règles (Based Rules Order) et s’est affaiblie en un simple pouvoir.
Qu’est-ce que cela signifie ? L’efficacité ou le rayonnement initial de cette puissance caractérisée par l’admiration qu’elles avaient pu susciter, s’est progressivement infléchie dans le sens d’un pouvoir : la contrainte qu’elle exerce est perçue comme illégitime, comme obstacle et menace ; elle suscite plus de crainte que de respect, elle est pointée du doigt par la protestation grandissante des BRICS dont notre classe dirigeante européiste et mondialiste ne veut rien savoir. Ce qui caractérise une puissance stricto sensu - comme l’expliquait en substance Spinoza - c’est une force d’exister, une capacité à “composer”, c’est-à-dire une force de maintenir dans l’unité d’une notion commune, les termes divers ou adverses d’une contradiction. Potentia posse existere [1], dit Spinoza dans son Ethique (Partie I, proposition 11) et exister, positivement, c’est exercer cette puissance, c’est tenir les contradictions dans la composition ou la communauté d’une unité supérieure. Le pouvoir, au contraire, est une force qui manque de puissance, une force impuissante parce qu’elle veut - non pas surmonter la contradiction - mais la supprimer.
Un événement majeur, contemporain de Spinoza (mais dont il n’a pas parlé), a illustré sa théorie de la puissance et des notions communes : c’est la conclusion des Traités de Westphalie, en 1648, qui mettent fin à Trente ans de guerres fratricides, intra-européennes. Tandis que le pouvoir s’érode à vouloir empêcher et contraindre, à lutter ou éliminer les contradictions, la puissance s’efforce de négocier pour intégrer, d’unir et de composer les contradictions.
Leurs stratégies sont opposées : celle du pouvoir est exclusive, celle de la puissance est inclusiviste ou intégrative.
En choisissant de désigner les pays leaders des BRICS comme des ennemis, les classes savantes et dirigeantes européennes ont fait le choix de la première stratégie, c’est-à-dire le choix du rapport de pouvoir. Elles l’ont fait contre la Russie post-soviétique en avançant les troupes de l’OTAN vers l’Est, et de façon récurrente, contre la Chine, sinon depuis les guerres de l’Opium et les Traités Inégaux (1840-42), du moins depuis l’arrivée de Deng Xiaoping (1978) ! Ce choix du pouvoir, contre celui de la puissance, est l’aveu de leur impuissance.
Le remède pour l’Europe découle de ce diagnostic.
“Elever le niveau de l’Etat de Droit” en Europe devrait donc passer par une réflexion des classes dirigeantes et intellectuelles européennes sur les moyens d’accroître la puissance collective, soigneusement distinguée des moyens du pouvoir qui sont le plus souvent des moyens impuissants (telles que le démontre en général l’inefficacité des trains de sanction).
Cette distinction du pouvoir et de la puissance qui me semble essentielle pour éviter les errements de la géopolitique, essentielle pour la paix mondiale, se trouve déjà au moins partiellement discutée par quelques auteurs immenses de la civilisation européenne : outre Spinoza (Éthique, Première Partie), on peut citer Hobbes (Léviathan, chapitre X), chez Rousseau (Rousseau juge de Jean-Jacques, premier Discours), et bien sûr chez Schopenhauer, Nietzsche et Bergson.
Mais cette distinction et ses implications morales et politiques sont absolument inexistantes dans toute la littérature juridique consultable. Il est étonnant qu’une distinction aussi importante de la philosophie ne rencontre aucun écho dans la réflexion des juristes.
Je voudrais encore, avant de terminer, alerter sur l’un des symptômes morbides de la rhétorique savante occidentale du pouvoir. Ce symptôme, c’est le déni ou le refus de reconnaître à la Chine socialiste la dignité même d’un interlocuteur politique puisque nos universitaires, jusqu’au Collège de France, la dénoncent comme tyrannie, despotisme, voire comme totalitarisme.
Sur ces outrances, qui sont hélas proférées sans rire, il suffit par exemple d’écouter Anne Cheng. Et on vérifiera en tous cas sans peine sur Internet qu’il n’existe dans l’université, à l’exception de la thèse que j’ai moi-même soutenu à Paris X-Nanterre en 2022, aucune thèse ni aucun article scientifique sur la “démocratie socialiste ou démocratie consultative”, c’est-à-dire sur le paradigme chinois de la démocratie. Car il y a un consensus partagé des savants et politiques occidentaux pour s’entendre sur le fait que, pour plagier Sieyès qui disait en 1789 que la France “n’est pas une démocratie et ne saurait l’être”, la Chine socialiste n’est pas non plus une démocratie et ne saurait l’être.
Je ne dis pas, loin s’en faut, qu’il faut croire sur parole qu’elle en est une et l’encenser comme telle. Je dis seulement qu’il me semble choquant de refuser d’en discuter dans le respect honnête des méthodes scientifiques, puisque sur la base d’une doctrine marxiste qui a sa cohérence, Xi Jinping, au chapitre VIII du tome II de la Gouvernance de la Chine, dans des discours qui, rappelons-le, ont valeur constitutionnelle en Chine, donne les éléments essentiels qui permettent de définir ce qui caractérise le modèle chinois de la “démocratie socialiste”.
Je module donc et reformule à la question que je posais plus haut : est-ce que traiter nos interlocuteurs chinois par le déni ou le mépris augmente ou diminue nos chances de les rencontrer sur le terrain d’un dialogue fructueux ? La question contient sa réponse. Et on peut la généraliser : quels doivent être nos discours et nos choix si nous voulons augmenter nos chances de rencontrer nos interlocuteurs politiques, c’est-à-dire dialoguer avec eux, lier ou nouer des échanges profitables à nos intérêts respectifs ? Spinoza nous invitait à “comprendre” (Traité Politique, I, 4) et à refuser de juger, de railler ou de condamner ce que nous ne comprenons pas. Mais comme l’indiquent la sinophobie et les lacunes de la recherche universitaire occidentale massivement réduite sur ce sujet à l’exercice du pamphlet, il est plus facile de juger que de comprendre.
C’est dans cet esprit que Montaigne aussi avait mis en garde contre ce qu’il appelait dans les Essais : la “présomption”, c’est-à-dire la tentation d’absolutiser notre point de vue particulier, la prétention d’avoir le monopole de la vérité. A l’aube de cette longue crise de la culture européenne qu’inauguraient les fanatismes du XVIème siècle - une crise qui n’en finit manifestement pas - Montaigne alertait sur la tentation d’absolutiser son point de vue, de combattre la différence comme une erreur et l’erreur comme un crime : quand cette “présomption” embrase le personnel intellectuel et politique, sa contagion fanatique enflamme le corps social de fantasmes mortels.
C’est donc par un hommage à ces philosophes que j’aimerais clore cette présente contribution - sorte de “manifeste” en faveur du multiperspectivisme, c’est-à-dire en faveur de la confrontation raisonnée des points de vue contradictoires. L’histoire de l’Europe peut se lire avec Montaigne, Bodin, Leibniz, Spinoza et quelques autres, comme un long combat contre la tentation de cet universalisme hégémonique qui est la face sombre de notre modernité : l’hégémonisme des Ligueurs contre les Protestants pendant les guerres de Religions, celui des colons européens contre les indigènes d’Amérique, de l’Orient et de l’Extrême-Orient dans les siècles suivants, jusqu’à celui la doctrine Wolfowitz - tout cela est la matière noire qu’une alchimie du bon sens de la raison peut se donner l’objectif de transmuter en lumière. A cet universalisme unipolaire ou hégémoniste, à sa pratique décomplexée du double-standard et aux violences militaires qu’elle appelle, on peut essayer de répondre par un retour au bon sens historique, c’est-à-dire par une réflexion qui facilite le retour ou l’accouchement de ce monde multipolaire.
Philosophiquement, cela suppose essentiellement de comprendre que les contradictions n’y sont pas nécessairement synonymes de rivalité et de rapport de force, mais aussi de conciliation, d’équilibre, d’harmonie. Cela suppose de comprendre, contrairement à ce que disait le premier ministre britannique Starmer, que rien n’a changé, parce que comme comme l’analysait déjà Héraclite, c’est polemos, c’est-à-dire le conflit, la contradiction qui fait que tout coule, que tout change dans le monde à chaque instant : et le défi pour l’intelligence n’est pas de supprimer ou d’anéantir ces contradictions mais de les faire jouer dialectiquement, comme le préconisait Nicolas de Cues. Tel est le sens de la “conjonction des opposés” - que Montaigne connaissait aussi et qu’il exerce activement tout au long des Essais.
C’est à ce défi de l’intelligence que nous invitent encore les pays du Sud Global et leur principe des accords gagnant-gagnant, ou que nous invitait déjà, un peu avant ici même, la “Troisième Voie” du Général de Gaulle “entre libéralisme et communisme”. Tel est en conclusion le diagnostic des humeurs pessimistes et guerrières qui assombrissent encore l’Europe, sur lequel se fonde un pronostic optimiste encourageant les bonnes volontés.
Tony Blair’s speech in Chicago in 1999 has become the sad compass of our Europeanist ruling class, justifying through clever sophistry the defense of values that are openly warlike. The sophistry consists of labeling as dangerous not the one who would threaten these values, but the one who dares to refuse their hegemony. This discourse is implemented through a method that is limited to an avalanche of pejorative judgments, going as far as reductio ad Hitlerum. These judgments essentially target Russian and Chinese interlocutors, designated as adversaries, or even vital enemies. China is always presented in the EU’s official doctrine as « an economic partner and a systemic rival ». And let us remember that, now going against the tide of peace negotiations, the EU is escalating this week against Russia with a 16th round of sanctions.
It goes without saying that they are convinced of being right and of being reason itself. But when one plays « who’s right ? », when one wants to persuade one’s interlocutors that they are wrong, and demonizes them, when one designates them as adversaries that must absolutely be subdued, when one thus conceives the relationship with the other essentially as a relationship of power or domination, one does not increase the collective chances of achieving a common peace. On the contrary, one maintains divisions and feeds Manichaeism : in a counterproductive way, accusations and condemnations increase the risk of conflict because they force the other to defend themselves, to trigger natural mechanisms of aggressive defense that will maintain rivalry. In short, when one plays « who’s right ? », one cannot and should not ignore that one necessarily intensifies or aggravates conflicts. One does not resolve them.
The question that arises is therefore : are those who choose this method unaware that their attitude is toxic and counterproductive ? Are they simply naive and immature ? It is possible. Or are they fanatically convinced by the military-financial powers that underpin their power, that in the name of their universal « values », they are the guardians of a just war against Evil ?
When, at the end of World War II, the financial feudalities served by NATO established their power to the point of hyperpower, they gave themselves the right to designate the enemy, unilaterally if necessary, that is to say, by exempting themselves from UN blessings. From the Second Iraq War to the Ukraine War, passing through Libya, they gave themselves the privilege of intervening in various forms without a UN resolution, that is to say, of circumventing international law. But now « everything has changed », as the British Prime Minister (Starmer) bitterly discovers, not only because « everything changes » (Panta rhei) as Heraclitus philosophically proclaimed, but because the abuses of power by the Global West have worn out its power at an accelerated rate.
If it had been possible to reign over the world without encountering any contradiction, as a certain Fukuyama had dreamed in 1992 after the collapse of the Soviet regime, History would have undoubtedly been over. But that’s not what happened. No need to rehash here the widely known history of the manipulation of color revolutions, Colin Powell’s lies, NATO’s « just » wars present even in the Pacific Ocean, or the bailout of the banking system as-is in 2008. The diagnosis is clear : by exempting itself from the Rules it imposed on others, the power of the Global West has devalued the Rules-Based Order and weakened itself into a mere power.
What does this mean ? The initial effectiveness or influence of this power, characterized by the admiration it had been able to inspire, has gradually shifted towards a power : the constraint it exerts is perceived as illegitimate, as an obstacle and threat ; it inspires more fear than respect, is pointed out by the growing protest of the BRICS, which our Europeanist and globalist ruling class wants to know nothing about.
What characterizes power strictly speaking - as theorized Spinoza - is a force of existence, a capacity to « compose », that is to say, a force to maintain in the unity of a common notion, the diverse or adverse terms of a contradiction. Potentia posse existere (the potential to exist), says Spinoza in his Ethics (Part I, proposition 11) and to exist, positively, is to exercise this power, it is to hold contradictions in the composition or community of a higher unity.
Power, on the contrary, is a force that lacks potency, an impotent force because it wants - not to overcome contradiction - but to suppress it.
A major event, contemporary to Spinoza (but which he did not discuss), illustrated his theory of power and common notions : the conclusion of the Treaties of Westphalia in 1648, which ended thirty years of fratricidal, intra-European wars. While power erodes itself by wanting to prevent and constrain, to fight or eliminate contradictions, potency strives to negotiate, to integrate, to unite and compose contradictions. Their strategies are opposed : that of power is exclusive, that of potency is inclusivist or integrative.
By choosing to designate the leading BRICS countries as enemies, the European intellectual and ruling classes have chosen the first strategy, that is, the choice of power relations. They did this against post-Soviet Russia by advancing NATO troops eastward, and recurrently against China, if not since the Opium Wars and the Unequal Treaties (1840-42), at least since the arrival of Deng Xiaoping (1978) ! This choice of power, against that of potency, is the admission of their impotence. The remedy for Europe stems from this diagnosis.
« Raising the level of the Rule of Law » in Europe should therefore involve a reflection by European ruling and intellectual classes on the means of increasing collective potency, carefully distinguished from the means of power which are most often impotent means (as demonstrated generally by the ineffectiveness of rounds of sanctions).
This distinction between power and potency, which seems essential to me to avoid the pitfalls of geopolitics and is crucial for world peace, has already been at least partially discussed by some immense authors of European civilization : besides Spinoza (Ethics, First Part), we can quote Hobbes (Leviathan, Chapter X), Rousseau (Rousseau Judge of Jean-Jacques, First Discourse), and of course Schopenhauer, Nietzsche, and Bergson.
However, this distinction and its moral and political implications are absolutely non-existent in all the legal literature. It is surprising that such an important philosophical distinction finds no echo in legal thinking.
Before concluding, I would like to alert you to one of the morbid symptoms of Western scholarly rhetoric of power. This symptom is the denial or refusal to recognize socialist China as even a political interlocutor, since our academics, up to the Collège de France, denounce it as tyranny, despotism, or even totalitarianism.
On these excesses, which are unfortunately uttered without laughter, it is enough to listen to Anne Cheng, for example. And one can easily verify on the Internet that there exists in the university, with the exception of the thesis I myself defended at Paris X-Nanterre in 2022, no thesis or scientific article on « socialist democracy or consultative democracy, » that is, on the Chinese paradigm of democracy. For there is a shared consensus among Western scholars and politicians to agree that, to plagiarize Sieyès who said in 1789 that France « is not a democracy and could not be one », socialist China is also not a democracy and could not be one.
I am not saying, far from it, that we must take it on faith that it is one and praise it as such. I am only saying that it seems shocking to refuse to discuss it in the honest respect of scientific methods, since on the basis of a Marxist doctrine that has its coherence, Xi Jinping, in chapter VIII of volume II of The Governance of China, in speeches that, let us remember, have constitutional value in China, gives the essential elements that make it possible to define what characterizes the Chinese model of « socialist democracy. »
I therefore modulate and rephrase the question I asked earlier : does treating our Chinese interlocutors with denial or contempt increase or decrease our chances of meeting them on the ground of a fruitful dialogue ? The question contains its answer. And we can generalize it : what should our discourses and our choices be if we want to increase our chances of meeting our political interlocutors, that is to say, to dialogue with them, to link or establish exchanges profitable to our respective interests ? Spinoza invited us to « understand » (Political Treatise, I, 4) and to refuse to judge, to mock, or to condemn what we do not understand. But as indicated by the sinophobia and the shortcomings of Western university research massively reduced on this subject to the exercise of the pamphlet, it is easier to judge than to understand.
It is in this spirit that Montaigne also warned against what he called in the Essays : « presumption, » that is, the temptation to absolutize our particular point of view, the pretension to have the monopoly of truth. At the dawn of this long crisis of European culture inaugurated by the fanaticisms of the 16th century – a crisis that is manifestly not ending – Montaigne warned of the temptation to absolutize one’s point of view, to combat difference as an error and error as a crime : when this « presumption » ignites the intellectual and political staff, its fanatical contagion inflames the social body with deadly fantasies.
It is therefore with a tribute to these philosophers that I would like to close this present contribution - a kind of « manifesto » in favor of multiperspectivism, that is, in favor of the reasoned confrontation of contradictory points of view. The history of Europe can be read with Montaigne, Bodin, Leibniz, Spinoza and a few others, as a long struggle against the temptation of this hegemonic universalism which is the dark side of our modernity : the hegemonism of the Leaguers against the Protestants during the Wars of Religion, that of the European colonists against the natives of America, the Orient and the Far East in the following centuries, up to that of the Wolfowitz doctrine - all this is the dark matter that an alchemy of common sense of reason can set itself the objective of transmuting into light. To this unipolar or hegemonic universalism, to its uninhibited practice of double standards and to the military violence it calls for, we can try to respond by a return to historical common sense, that is, by a reflection that facilitates the return or the birth of this multipolar world.
Philosophically, this essentially presupposes understanding that contradictions are not necessarily synonymous with rivalry and power relations, but also with conciliation, balance, harmony. This presupposes understanding, contrary to what British Prime Minister Starmer said, that nothing has changed, because as Heraclitus already analyzed, it is polemos, that is to say, conflict, contradiction that makes everything flow, that everything changes in the world at every moment : and the challenge for intelligence is not to suppress or annihilate these contradictions but to make them play dialectically, as Nicolas de Cues advocated. Such is the meaning of the « conjunction of opposites » - which Montaigne also knew and which he actively exercises throughout the Essays.
It is to this challenge of intelligence that the countries of the Global South still invite us and their principle of win-win agreements, or that the « Third Way » of General de Gaulle « between liberalism and communism » already invited us.
Such is in conclusion the diagnosis of the pessimistic and warlike humors that still darken Europe, on which an optimistic prognosis encouraging goodwill is based.
« Souveraineté ‘’à la chinoise’’ » : cet essai de philosophie chinoise comparée est consacré au concept de souveraineté, tel que les principaux idéologues du parti communiste chinois en ont pensé l’importance, dans une mise en œuvre qui leur semble être la condition première de toute politique proprement dite, c’est-à-dire de toute liberté collective.
Dire qu’en démissionner serait renoncer à la politique elle-même ne suffit pas. Il faut redéfinir et repenser le concept de souveraineté, en s’intéressant à la façon dont les penseurs du projet socialiste chinois, de Mao Zedong à Xi Jinping, en ont eux-mêmes reformulé le sens et les problèmes essentiels.
Cet essai a pour but d’aider à comprendre le rôle nouveau de la Chine dans un monde en cours de recomposition. Par sa méthode comparative, il espère aussi être utile à questionner, après De Gaulle, notre propre chemin, aujourd’hui en panne – celui d’une « troisième voie », ni américaine ni orientale, ni capitaliste ni communiste, simplement conforme aux intérêts fondamentaux d’un peuple français.
[1] La puissance, c’est de pouvoir exister