« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller

Accueil > Notre action > Coalition int. pour la paix

Dennis Kucinich, adepte de la non-violence, prend part à la CIP #99

6 mai 2025

Dialogue entre intervenants à la CIP lors de la réunion du vendredi 25 avril 2025, avec :
Dennis Kucinich, ancien maire de Cleveland, représentant démocrate de l’Ohio, candidat à l’investiture démocrate pour l’élection présidentielle américaine de 2004, (https://kucinichreport.substack.com)
Ray McGovern, Ray McGovern, ancien analyste de la CIA et co-fondateur des Veteran Intelligence Professionals for Sanity (VIPS)
Dennis Small, Editeur de l’Executiv Intelligence Review
Père Harry Bury, prêtre catholique, activiste pour la paix
Dennis Speed, Schiller Institue

Modératrice : Anastasia Battle

Dennis Kucinich : Tout d’abord, je tiens à vous remercier de m’avoir invité et à remercier chacun d’entre vous pour son engagement personnel en faveur de la paix et de la justice sociale et économique. Le chemin que chacun d’entre vous a parcouru jusqu’à ce moment est honoré ; et je suis reconnaissant de participer, ne serait-ce que pour quelques minutes.

Je reviens sans cesse sur ce point - c’est comme si nous avions besoin d’un nouveau langage pour décrire l’horreur qui se produit - mais les justifications, les rationalisations qui ont été faites réclament notre réponse. Le système politique est corrompu, malheureusement, et, au sein de ce gouvernement, ils sont peu nombreux à s’adresser aux médias pour protester, en particulier, contre ce qui se passe à Gaza. Il y a donc une anesthésie, une sorte d’engourdissement des esprits qui s’est installé. Pourtant des gens continuent de se réveiller, des groupes de personnes dans tout le pays et certainement dans le monde entier descendent dans la rue. Et je pense qu’en fin de compte, c’est ce type d’action non violente qui contribuera à faire pencher la balance. C’est, en particulier, lorsque les étudiants sont descendus dans la rue pendant la guerre du Vietnam que Lyndon Johnson a décidé qu’il ne pouvait plus la justifier, et s’est finalement retiré du pouvoir. Bien sûr, Nixon et Kissinger l’ont poursuivie pendant quelques années encore, mais l’effervescence qui gagnait le pays a permis de reconsidérer le rôle de l’Amérique.

Mais nous retournons à la violence de masse. Il y a eu le Vietnam, l’Irak, Gaza, et c’est un arc d’inhumanité dans notre pays. Aux États-Unis - je sais qu’il y a des gens qui viennent d’ailleurs - les États-Unis sont l’un des principaux initiateurs de ce phénomène. Nous avons donc beaucoup de travail à faire dans notre propre pays. Ce n’est pas seulement au niveau politique ; avant même d’arriver au niveau politique, nous devons réfléchir à la conscience qui est à l’origine de ces politiques meurtrières. C’est un changement qui s’opère par l’instrumentalisation de nos propres êtres, en prenant la parole et en rassemblant les gens ; c’est pourquoi je remercie la CIP pour ce qu’elle fait et tous ceux d’entre vous qui font ce travail. Si je peux vous aider dans ce que vous essayez de faire, dites-le moi.

Anastasia Battle : Merci beaucoup, M. Kucinich. Je sais que Ray McGovern est très enthousiaste à l’idée de vous recevoir ; il tenait vraiment à ce que vous participiez à l’émission aujourd’hui. Je sais que votre temps est limité...

Dennis Kucinich : Ray est l’un de mes héros, c’est donc un plaisir d’être avec vous.

Anastasia Battle : Merveilleux ! Nous voulions nous assurer que vous étiez disponible, que vous pouviez rester un peu pour écouter ce qu’il avait à dire, et ensuite vous pourriez avoir une conversation.

Dennis Kucinich : Vous savez, je serais ravi d’entendre ce que Ray a à dire, alors oui, Ray, vas-y. Je reste encore quelques minutes avec vous.

Ray McGovern : Quel cadeau d’avoir tous ces Dennis ici, tous les trois, en particulier mon ami Dennis Kucinich, qui est probablement le successeur direct de mon véritable héros, John F. Kennedy ; un homme de paix, mais un homme de courage et un homme de justice. Et c’est de cela que je veux parler maintenant. Nous sommes issus de la même tradition religieuse, et cela représente beaucoup pour moi aussi. J’ai remarqué que le père Bury allait intervenir, ainsi que Jack Gilroy ; mon Dieu, nous avons là un groupe de catholiques romains issus d’une tradition œcuménique plus large, et j’insiste sur ce point.

Le pape François est mort. Qu’a fait François à propos de Gaza ? François a fait des déclarations pieuses sur Gaza. Sa déclaration la plus « remarquée » a été la suivante : « vous savez, mes conseillers m’ont dit que beaucoup de gens pensent qu’il pourrait y avoir un génocide en cours à Gaza, et je pense donc que nous devrions mener une enquête ». Cela s’est passé des mois après que le tribunal mondial ait déjà inculpé Netanyahou et Gallant. Cela me rappelle la Seconde Guerre mondiale et Pie XII, qui n’arrivait pas à trouver sa voix. Il y a des indignités structurelles, peu importe ce que François aurait voulu faire, il ne l’a pas fait ; c’est ce que je constate. C’est un type bien, c’est un homme, d’accord ? Mais lorsque mon webmestre a publié mon petit article à ce sujet, il a dit : « Les gentils ne gagnent pas les matchs de baseball, et les gentils n’arrêtent pas les génocides ».

Qu’est-ce qu’il faut en retenir ? Il y a de bonnes et de mauvaises nouvelles. Cela dépend de nous, et ça, c’est une bonne nouvelle, car nous sommes à la hauteur.

Revenons un peu en arrière. Yahvé s’adresse à Caïn après qu’il ait assassiné son frère : « Alors, Caïn, où est ton frère ? » Ce dernier répond : « Comment suis-je censé le savoir ? Ce ne sont pas mes affaires ? » Ou, plus fidèle au texte, « Suis-je le gardien de mon frère ? » Eh bien, je pense que les personnes qui participent à cet appel sont les gardiens de leurs frères et sœurs ; et les habitants de Gaza ont grandement besoin de notre aide en ce moment. Nous avons donc ce témoin de l’histoire biblique, mais nous avons aussi mon rabbin préféré, le rabbin Abraham Heschel, qui a déclaré : « En cas d’injustice, peu de gens sont coupables, mais tous sont responsables. L’indifférence au mal » - regardez Caïn par exemple. Qui se soucie de moi ? L’indifférence au mal est plus insidieuse que le mal lui-même. Abraham Heschel fut très actif à l’époque du Vietnam, etc.

Qui d’autre ? Eh bien, quelle est la gravité de la situation à Gaza ? Il y a eu l’archevêque Desmond Tutu, qui a travaillé avec Nelson Mandela et qui a connu l’apartheid en Afrique du Sud, n’est-ce pas ? Qu’a dit Tutu quand on lui a demandé : « Pourriez-vous comparer l’apartheid en Afrique du Sud et l’apartheid en Palestine ? » Il a répondu : « Oui, bien sûr, je peux faire cette comparaison. » Voici ce que c’est. « La vie en Palestine est bien plus brutale et répressive que dans l’Afrique du Sud de l’apartheid. » Et mes amis, c’était avant le génocide.

Je cite souvent un certain Albert Camus, et vous connaissez l’histoire, si vous avez écouté ces émissions, de la façon dont il a parlé aux Dominicains de l’absence de voix en provenance de Rome pendant la Seconde Guerre mondiale. Pour moi, un agnostique ? Une voix de Rome ? Oui, une voix de Rome ! Puis on m’a dit qu’il y avait une encyclique. J’ai dit : « Qu’est-ce qu’une encyclique ? » Il m’a alors dit : « Il faut que la voix se fasse entendre haut et fort pour que l’homme ou la femme le plus simple puisse la comprendre ; et ce n’est pas suffisant. » Il a également dit à un ami, au plus fort de la guerre en 1943 : « C’est le travail des gens qui pensent de ne pas être du côté des bourreaux ». Il reçoit le prix Nobel en 1957, où il exprime « l’espoir que la qualité de la nouvelle génération et sa réticence accrue à adopter des slogans ou des idéologies et à revenir à un système de valeurs plus tangibles. Nous n’avons rien à perdre », dit Camus, « sauf tout. Alors, allons-y. C’est le pari de notre génération ». Nous pourrions être guidés par des gens comme Dennis Kucinich. « Si nous devons échouer, il vaut mieux de toute façon avoir été du côté de ceux qui ont refusé d’être des chiens et qui sont résolus à payer le prix qu’il faut payer pour que les hommes et les femmes puissent être plus que des chiens. »

Enfin de Camus, en 1943, un échange épistolaire avec un jeune Allemand très fier. Il allait rendre à l’Allemagne sa grandeur. D’accord, les comparaisons sont abusives, mais ce sont ses mots. « Vous m’avez dit que la grandeur de mon pays, l’Allemagne, est inestimable », écrit ce jeune homme. « Tout ce qui contribue à sa grandeur est bon. Ceux qui, comme nous, jeunes Allemands, ont la chance de trouver un sens au destin de notre nation, doivent sacrifier tout le reste. » 1943 ; nous savions déjà que le génocide était en cours. « Non », dit Camus, « je vous l’ai dit, je ne peux pas croire que tout doive être subordonné à une seule fin. Il y a des moyens qui ne sont pas excusables, et je voudrais pouvoir dire que j’aime mon pays et que j’aime encore la justice. Je ne veux pas pour mon pays une grandeur née du sang et du mensonge. Je veux le garder vivant, et garder la justice vivante ».
Je voudrais terminer rapidement en évoquant des événements plus récents. Permettez-moi de revenir au rabbin Heschel. Il était à Selma ; il a participé à toutes sortes de processions et de manifestations en faveur de la justice. Voici ce qu’il a dit. « Pour beaucoup d’entre nous, la marche de Selma à Montgomery était une protestation et une prière. Les lacs ne sont pas des lèvres, et marcher n’est pas s’agenouiller. Et pourtant, nos jambes ont entonné des chants. Même sans paroles, notre marche était un culte. J’avais l’impression que mes jambes priaient, ou que mes jambes manifestaient ».

Et que dire d’un exemple plus récent ? Annie Dillard est l’une de mes théologiennes préférées. Voici ce qu’elle a dit : « Cela dépend vraiment de nous. Il n’y en a jamais eu d’autres, ni de papes, ni d’autres, ni de leaders moraux capables d’exercer une autorité.... Nous sommes assez nombreux, mais ce que nous devons faire, c’est nous rassembler à moitié vêtus en longues files comme des tribus et secouer nos gourdes les uns après les autres pour nous réveiller. Au lieu de cela, nous regardons la télévision et manquons le spectacle ».

Bon, je vais revenir à une histoire biblique et parler d’Isaïe, quelque chose que la plupart des gens ne savent pas. Saviez-vous qu’il s’est promené pendant deux ans, complètement nu ? Eh bien, c’est dans la Bible, les amis ; cherchez. Qu’essayait-il de dire ? Il essayait d’attirer l’attention sur lui. Les gens disaient : « Oh, c’est affreux ! Vous êtes tout nu. » Et ce qu’il a dit, c’est : « Je me suis dépouillé de mes vêtements. Vous êtes dépouillés des cadeaux que Yahvé vous a donnés. La vision de la justice et de shalom. » Shalom n’est rien d’autre, au sens biblique, que l’existence, la présence de la justice. Nous pouvons donc avoir la paix, mais nous devons d’abord avoir la justice.

La dernière chose que je dirai, c’est que nous devons garder la tête froide et considérer les avantages d’être solidaires les uns des autres. J’avais l’habitude de dire lorsque je prenais la parole : « Regardez autour de vous, pour l’amour de Dieu ! Comment ne pas être encouragé par de si bons compagnons de lutte ? » L’une de mes consolations, c’est que j’ai Oliver Stone auprès de moi. Il nous met en garde : « Écoutez, les seuls combats qui valent la peine d’être menés sont ceux que vous pouvez perdre, parce que quelqu’un doit les mener. Et quelqu’un doit perdre, perdre et perdre jusqu’à ce qu’un jour, quelqu’un qui croit comme vous gagne. » Dans ce processus, nous devons garder notre sens de l’humour et nous amuser un peu. Un de mes amis était prêtre et avait un frère qui l’était également. Ils sont tous les deux retournés voir leur mère irlandaise et lui ont parlé de tous les dogmes qu’ils avaient appris. Elle leur a dit : « Dites-moi, est-ce que vous vous êtes amusés lors de cette réunion ? » Ils étaient stupéfaits, car ils avaient compris que sans amusement, rien ne se passerait.

Alors, faisons preuve de justice, amusons-nous un peu, mais tenons-nous en à la ligne, comme l’ont déjà fait Dennis Kucinich et nombre d’entre vous. Merci de m’avoir laissé parler.

Anastasia Battle : Merci, Ray ! M. Kucinich, voulez-vous dire quelque chose ?

Dennis Kucinich : Je tiens également à remercier Ray pour sa présentation érudite. C’est à nous de jouer. Ce que je fais en ce moment, c’est écrire ; je poste sur substack ; si vous avez l’occasion d’aller sur denniskucinich@substack, vous pouvez vous abonner gratuitement. J’écris exactement sur les sujets qui nous préoccupent.
Merci pour le travail que vous faites tous. Merci encore, Ray. Et je me réjouis de vous revoir, de vous rejoindre à nouveau. Continuez ! Je vous remercie.

Ray McGovern : Souhaitez-moi bonne chance ; et ceux d’entre vous qui sont du genre à prier, veuillez me garder dans la lumière. Cet après-midi, je pars pour Moscou avec Oliver Stone. Nous avons prévu plusieurs réunions et panels. Et surtout, nous serons là pour le 80e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors que nous étions alliés. Nous voulons insister sur le fait que nous étions alliés à l’époque. John Kennedy, dans son merveilleux discours sur la paix, a déclaré que les États-Unis et la Russie n’avaient jamais été en guerre, presque seuls parmi les grandes puissances du monde. Nous allons essayer de parler et de faire passer le message. Peut-être que certains reviendront aux États-Unis. Mais l’idée est qu’il y a lieu de se réjouir, qu’il est possible que Steve Witkoff, qui se trouve à Moscou en ce moment même et vient de s’entretenir avec Poutine, ait de bonnes nouvelles à nous annoncer. Je pense que c’est là que les choses se jouent. Souhaitez-moi bonne chance et je ne pourrai probablement pas me joindre à vous la semaine prochaine, mais je serai avec vous en esprit.

Dennis Small : J’ai un conseil à vous donner, Ray, pour votre voyage. Amusez-vous bien !

Ray McGovern : Parfait ! OK, sur ce, merci beaucoup à tous.

Et un peu plus tard dans les échanges :

Père Harry Bury : Ce qui est vraiment significatif pour moi, c’est que Helga a insisté sur l’importance de considérer les gens comme étant tous de bonnes personnes. Et le Pape François, a traité les gens comme étant tous bons. L’une des raisons des conflits dans le monde, me semble-t-il, est que nous comprenons mal ce qu’est la justice. Nous pensons que la justice est synonyme de vengeance. Nous pensons donc que le moyen de mettre fin au mal, d’empêcher les gens de faire de mauvaises choses, est de les punir. Or, la punition, c’est la violence ; et quand on utilise la violence, on aboutit à la vengeance. C’est ce que nous vivons. Helga et le pape François ont plaidé contre cela.

Le plan Oasis appelle à l’équité, ce qui signifie traiter tout le monde de la même manière. L’Institut Schiller et le pape François ont donc délivré le même message. Et j’espère que les gens ont commencé à comprendre que la raison pour laquelle les gens du monde entier ont aimé le pape François, c’est parce qu’il pense aux personnes en marge de la société. Et il n’y aurait pas de gens en marge si nous avions le plan Oasis dans lequel nous obtenons la paix par le développement. Il est donc important pour moi de comprendre et de promouvoir le plan Oasis parce qu’il est dans l’esprit du pape François. Je vous remercie.

Dennis Speed : Merci, Père Bury. Permettez-moi de dire quelque chose, car de nombreuses personnes qui seront présentes ne le savent pas à votre sujet. M’adressant aux participants de la réunion, je vais vous lire un simple extrait de sa biographie :
« L’activisme du père Bury a commencé alors qu’il était un nouveau prêtre, au Newman Center de l’université du Minnesota dans les années 1960, lorsque de jeunes hommes catholiques lui ont demandé d’écrire des lettres pour eux en tant qu’objecteurs de conscience pour la guerre du Viêt Nam. En 1971, à la demande de certains Vietnamiens, il s’est enchaîné avec trois autres personnes à la porte de l’ambassade des États-Unis à Saigon pour protester contre la guerre du Vietnam ».

Ce n’est donc pas à une manifestation ici qu’Anastasia faisait référence. Il s’agit d’une manifestation à Saigon dans les années 1970. C’est tout à fait dans l’esprit du rabbin Heschel. Puis, en 2005, il était à Gaza, servant de bouclier humain, lorsqu’il a été temporairement enlevé à ce moment-là. Il s’agit donc d’un homme qui a fait exactement ce dont Ray McGovern parlait tout à l’heure. Nous sommes toujours honorés de l’avoir parmi nous, et nous sommes particulièrement honorés de son idée claire sur le plan Oasis qui a été proposé et qui sera discuté lors de notre conférence.

Je voulais donc m’assurer, Père Bury, que vous étiez reconnu pour cela. Et je vous remercie encore une fois pour vos remarques.

Anastasia Battle : J’aimerais maintenant donner la parole à Carolina qui nous parle depuis le Mexique. Elle a un rapport sur le processus de recrutement des jeunes. Comme on l’a vu ces dernières semaines, nous avons fait un gros effort, en vue de la conférence de mai, pour aller dans les universités, là où se trouvent de nombreux jeunes, afin de les rendre actifs. Le Mexique, en particulier, a eu beaucoup de succès. Nous sommes donc heureux d’accueillir Carolina Dominguez pour nous présenter son rapport.

Carolina Dominguez : Je voudrais vous parler des activités que nous menons non seulement au Mexique, mais aussi en Amérique latine. Je voudrais tout d’abord mentionner un document qui nous a aidés dans notre travail avec les jeunes. Il s’agit d’un livre de Martin Luther King intitulé « Why We Can’t Wait » (Pourquoi nous ne pouvons pas attendre), un livre extraordinaire que je recommande à tout le monde. Il le dédie à ses enfants, mais dans son avant-propos, il dit qu’il espère qu’à l’avenir, ses enfants seront jugés non pas sur la couleur de leur peau, mais sur leur caractère et leurs actions.
Dans ce livre, il présente la fameuse lettre qu’il a écrite dans la prison de Birmingham, dans laquelle il répond aux critiques de ses collaborateurs qui disaient que ses actions n’étaient pas correctes, et que c’était pour cela qu’il était en prison. Il dit quelque chose de très drôle : je ne réponds pas à mes détracteurs, parce que si je le fais, je ne pourrai rien faire. Ce qui est important, ce sont les actions, et en ce sens, il répond à quelque chose qui, pour nous, a été fondamental - le travail avec les jeunes.

Il s’agit du concept d’action non violente. Il répond que même s’ils doivent organiser des manifestations et des activités, il affirme que le meilleur moyen de parvenir à des accords est la négociation. Martin Luther King dit que c’est vrai, mais lorsque les dirigeants ne veulent pas négocier parce qu’ils ne considèrent pas que ce que l’autre partie présente est important, nous devons provoquer cette négociation ; provoquer une tension. C’est ce dont il parle en créant une tension par le biais de l’action directe. L’individu doit clairement indiquer qu’il n’est pas d’accord avec ce qui se passe. Moralement, l’individu doit être très clair sur le fait que ce qui se passe n’est pas ce en quoi il croit ; il doit être très clair sur ce point, non seulement dans son cœur, mais aussi dans la société. Ces actions non violentes créent une tension qui leur permet d’être entendues.

Pour nous, c’est très important car, bien sûr, beaucoup de gens considèrent que notre mobilisation, notre manifestation ou notre action pour être en désaccord avec les idées doit être violente, mais pas l’idée que cela ouvrira la voie à une proposition. C’est précisément ce que nous faisons avec le mouvement international de la jeunesse, non seulement au Mexique et en Amérique latine, mais aussi à l’échelle internationale, sous la direction de Lyndon LaRouche et, aujourd’hui, de Helga Zepp-LaRouche. Nous générons cette tension, afin de ne pas utiliser les jeunes comme boucs émissaires, comme c’est le cas avec les guerres et les partis politiques qui les utilisent pendant les élections, pour ensuite les rejeter.

À l’Institut Schiller, nous menons une campagne constante d’éducation aux idées profondes qui permettent aux jeunes de devenir des leaders. Ces idées impliquent des propositions économiques. Dans ce processus de travail avec les jeunes, il faut d’abord comprendre qu’ils ont besoin d’un niveau qui leur permette de se faire entendre. Les jeunes ont un grand potentiel, non seulement en raison de leur âge, mais aussi parce qu’ils prennent des décisions concernant leur qualité morale à long terme. Nous devons leur fournir les outils nécessaires pour que, lorsqu’ils décideront de la qualité morale de la voie qu’ils choisiront, ils aient suffisamment de connaissances pour faire ce qui est juste.

Dans le cadre de ce travail avec les jeunes, nous organisons des réunions et des dialogues internationaux auxquels participent des représentants de Colombie, du Brésil, d’Argentine, du Mexique, d’Europe et des États-Unis. Ils nous font part de leurs préoccupations concernant la situation actuelle. Bien sûr, ils ne veulent pas d’une guerre, mais ils ne voient pas ce qu’ils peuvent apporter à la société. La semaine dernière, nous avons eu un dialogue international de la jeunesse au cours duquel les jeunes ont présenté plusieurs propositions concernant l’énergie, les types d’emplois qu’ils occuperont et ce qu’ils peuvent faire pour changer la situation. Ils se sont montrés très ouverts et ont posé des questions fondamentales auxquelles il convient de répondre. Je tiens à dire que lorsque nous générons cette tension, lorsqu’un membre du Congrès ou un dirigeant dit « OK, je vais vous écouter », qu’avez-vous à lui dire ? Nous devons être prêts avec ce que nous allons dire, parce qu’il y a un état de tension. Nous devons avoir ces propositions, et les jeunes doivent savoir comment changer l’économie. C’est pourquoi nous organisons ces dialogues de jeunes.

C’est pourquoi nous travaillons avec eux sur ce qu’est une économie, sur le fait qu’elle doit donner de la valeur aux êtres humains, parce que le principal produit d’une économie, ce sont eux. LaRouche a dit que le principal moteur de l’économie est la créativité, les idées générées par les individus qui veulent améliorer les choses. Ainsi, lorsqu’ils s’adressent à un dirigeant et lui demandent « Qu’avez-vous à me dire ? », ils doivent être très clairs sur le fait que ce que nous présentons est ce qui fonctionnera pour l’économie. C’est ce que nous enseignons aux jeunes : ce qu’est la productivité, ce qu’est une économie. Il y a eu beaucoup de polémiques. Nous en avons entendu parler dans ces réunions. Quel est le meilleur type d’énergie qui peut fonctionner pour leurs pays ; quel type d’emplois ? Nous pensons que cela a été très optimiste. La réunion des jeunes a été très bonne, parce que les gens ont pu exprimer comment les choses se passaient et leurs propositions.

J’ai trouvé très amusant le type de problèmes que nous avons avec les jeunes. Il y avait un jeune homme du Brésil qui se rendra à la conférence de New York en mai. Les interprètes traduisaient de l’anglais vers l’espagnol, mais à un moment donné, il a commencé à parler en portugais. C’était très drôle, parce que nous étions tous silencieux ; il n’y avait aucun moyen d’interpréter ses paroles du portugais vers l’espagnol ou l’anglais. Cela a changé la géométrie de la réunion : nous avons réfléchi à la manière d’écouter les propositions des jeunes d’Amérique latine dans leur langue et de transmettre ces idées à d’autres jeunes dans le monde. Voilà le type de sujets que nous voulons aborder dans ce dialogue avec les jeunes ; comment nous pouvons répondre à ce qu’ils présentent et à ce que nous faisons.

Nous organisons ces réunions en permanence, en particulier avec Helga. Cette fois-ci, Megan Dobrodt et Jason Ross ont participé à la réunion. La réunion a été très productive et les participants se sont montrés très optimistes sur le fait que, comme l’a dit Martin Luther King, nous faisons ce travail avec les jeunes parce qu’il est nécessaire et que les personnes qui critiquent le fait qu’il ait créé cette tension ne comprennent pas.

Je voudrais terminer par une autre citation de Martin Luther King, tirée de la même lettre. Comme Socrate, il pensait qu’il était nécessaire de créer un état de tension dans l’esprit pour que les gens puissent surmonter leur dépendance et créer un moyen de devenir des individus : « Tout comme Socrate estimait qu’il était nécessaire de créer une tension dans l’esprit pour que les individus puissent s’élever de l’esclavage des mythes et des demi-vérités au royaume sans entraves de l’analyse créative et de l’évaluation objective, nous devons voir la nécessité pour les mouches du coche non violentes de créer le type de tension dans la société qui aidera les hommes à s’élever des sombres profondeurs des préjugés et du racisme aux hauteurs majestueuses de la compréhension et de la fraternité. Le but de notre programme d’action directe est de créer une situation de crise telle qu’elle ouvrira inévitablement la porte à la négociation. Je suis donc d’accord avec vous dans votre appel à la négociation. Depuis trop longtemps, notre cher Southland s’enlise dans un effort tragique pour vivre dans le monologue plutôt que dans le dialogue ».

C’est ce qui se passe avec les jeunes. Nous les invitons à s’inscrire et à participer à la conférence de mai. Ce sera très important. Nous aurons un panel de jeunes qui présentera ces propositions et le travail que nous faisons avec eux. Voilà ce que je voulais vous présenter. Je vous remercie de votre attention.

Votre message