« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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15 août 2023
A l’heure où la France multiplie les maladresses, les incohérences et, pour tout dire, fait preuve d’une vision totalement dépassée de la situation, la déclaration suivante de Jacques Cheminade, président de Solidarité et Progrès, ancien candidat à l’élection présidentielle et invité de l’Institut Schiller, donne le sens des enjeux et de ce qui pourrait être adopté, pendant qu’il en est encore temps, comme choix politique.
Jacques Cheminade
Paris, le 15 août 2023 – Disons-le d’emblée : les va-t-en guerre de Paris et de la CEDEAO doivent immédiatement cesser leurs menées néocoloniales et la France doit non moins immédiatement exiger la dissolution de l’OTAN. Ce n’est qu’à cette double condition que les pays du Sahel et la France pourront parvenir à établir des relations gagnant/gagnant, en exerçant tous leur pleine souveraineté.
J’écris ce texte sans attendre de miracle immédiat, mais absolument engagé à persévérer. Je suis convaincu que nous allons réussir. Car je sais que notre monde bascule vers l’Est et le Sud planétaires en cette veille de la réunion des BRICS, qui sera une étape décisive vers un nouvel ordre mondial plus juste.
Dans ce contexte, alors que les Africains entendent s’approprier leur destin, le gouvernement français parade comme un zombie de la Françafrique. Subissant lui-même l’occupation de l’oligarchie financière, il ne peut que se comporter à son tour en occupant.
Au cours de ma campagne présidentielle de 2017, j’ai appelé la France à chasser ses occupants financiers et à briser le garrot du franc-CFA. C’est ce qui me donne le droit de parler aujourd’hui au nom de notre avenir commun de peuples à libérer.
Les pistes à suivre sont simples, si nous avons la volonté politique de nous dégager de l’emprise des idéologies dominatrices :
1. Enterrer définitivement la Françafrique, non en vaines paroles mais en actes concrets qui la démantèlent. Pas de domination militaire ni économique, mais une coopération et un co-développement.
2. Au niveau international, agir pour cela en fonction de la paix et de la sécurité par le développement mutuel, en suivant la route tracée par la coopération entre pays membres des BRICS et l’initiative chinoise Une ceinture, une route. Il ne s’agit plus d’un face à face colonisateur/colonisé mais d’une coopération multilatérale, incluant la France, avec notamment la Chine, la Russie, le Brésil, la Turquie et l’Inde, dans un tout défini par ce nouveau nom de la paix qu’est le développement économique mutuel. Plus de franc-CFA, devenu de fait euro-CFA, mais des monnaies nationales émises par des banques nationales, soutenues par des crédits publics pour le développement humain.
3. « On aurait dû avoir des brigades de développement pour l’école, l’eau, la nourriture. Pas simplement la France des robocops circulant avec des blindés », viennent de dire les sénateurs français. Prenons-les au mot, ici et maintenant. Offrons aux pays africains (libre à eux de les accepter ou non) de véritables projets décidés par et avec eux, avec la participation de leurs peuples. Il faut être clair sur ce point : je suis convaincu que les capitaines, lieutenants-colonels et colonels des armées africaines, avec leurs soldats, représentent bien mieux les intérêts de leurs peuples que des « élites » élues sous diverses influences fort peu démocratiques.
4. L’Afrique ne doit plus être un échiquier de spéculations financières, livré de fait aux groupes armés terroristes. Nous devons aider les armées, les fonctionnaires et les polices à combattre un trafic de drogue qui désintègre les Etats et détruit les peuples. La guerre principale doit être menée au sein des grands établissements financiers « occidentaux » qui pratiquent un blanchiment tous azimuts. Elle doit d’abord viser les mafias corruptrices qui se trouvent au sommet, dans les métropoles occidentales.
5) Il n’est plus supportable, humainement et économiquement, que les pays francophones de l’Ouest africain soient parmi les plus pauvres du monde et les plus dépourvus en matière de santé publique, d’éducation, d’accès à l’eau potable et à l’électricité. Il n’est plus supportable que plus de 80 % des Nigériens n’aient pas accès à l’électricité alors que ce pays dispose de gisements d’uranium parmi les plus riches du monde. Ceux qui comprennent l’importance de l’énergie nucléaire civile pour le monde qui vient ne peuvent continuer à faire comme si le Niger était une source coloniale de pillage à bas prix et de détournement de fonds.
Utopiste ? Non, je suis optimiste et avec de bonnes raisons de l’être. Tout d’abord, répétons-le, le monde bascule vers un ordre de développement mutuel plus juste. Depuis longtemps, Lyndon LaRouche, ses amis et ses collaborateurs de l’Institut Schiller ont jeté les bases pour une politique de développement de l’Afrique contre le FMI et le consensus de Washington. Oui, nous avons été rejetés, tout comme les dirigeants africains se battant pour leurs peuples, mais aujourd’hui la lumière brille dans ce monde qui bascule. La jeunesse africaine, la plus jeune du monde, a d’immenses attentes. C’est une immense chance. A condition que nous lui fournissions un avenir. En aidant à former des ingénieurs, des chercheurs et des travailleurs qualifiés dans tous les domaines, depuis le spatial jusqu’à l’aménagement et la médecine dans le monde rural.
Fin juillet, notre responsable Sébastien Périmony était l’un des rares invités occidentaux au Forum Russie-Afrique de Saint-Pétersbourg. Il a participé à l’enthousiasme pour une nouvelle approche, par delà le colonialisme et le néocolonialisme. Non pas contre la France, mais au contraire pour lui assurer la place qu’elle doit tenir dans ce monde qui vient, pourvu que notre mouvement de la paix et la raison des dirigeants du monde parviennent à empêcher la guerre. J’ai moi-même depuis longtemps étudié les conceptions de Cheikh Anta Diop. Aujourd’hui j’espère que dans le réveil du Sénégal et de la France, l’Université qui porte son nom devienne réellement l’expression vivante de tout ce qu’il espéra. Le moment me semble venu, au sein d’un dialogue des civilisations et des cultures.
Je vois d’ici venir la question : est-ce raisonnable, et possible, de vous croire, avec le gouvernement français actuel et la présidence d’Emmanuel Macron ? La réponse est non si l’on pense à un monde figé. Dans la dynamique vers le monde qui vient, le combat de Solidarité & Progrès et de l’Institut Schiller joue sa partition. L’un comme parti politique en France, l’autre comme source d’inspiration et d’action dans le monde. Le son des tambours de guerre se fait entendre au loin. Ceux qui ne veulent pas les entendre ne peuvent les empêcher de se rapprocher.