« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller

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Le tunnel du détroit de Béring : un rêve centenaire qui doit devenir réalité

par Jason Ross

22 octobre 2025

Alors que la marche du monde oscille entre division géopolitique et promesse d’un développement coopératif, le tunnel du détroit de Béring se distingue par son potentiel de relier les continents comme les civilisations.

Au centre, le détroit de Béring : 88 kilomètres séparent les deux parties du monde

L’idée de connecter l’Eurasie aux Amériques en tirant parti de la contiguïté - une centaine de kilomètres - entre la Russie (péninsule Tchouktche) et l’Alaska a stimulé l’imagination des penseurs pendant plus d’un siècle, et avait même reçu en 1906 l’approbation directe du tsar Nicolas II. Les principes sous-jacents à ce projet ne se résument pas aux matériaux - béton, acier, etc - pour lui donner forme. Il s’agit d’une vision de la paix par le développement : relier des nations par un objectif commun plutôt que d’entretenir leur rivalité.

Le tunnel serait une pièce maitresse d’un véritable « pont » terrestre mondial, reliant New York à Shanghai, Paris à Buenos Aires, Dakar à Moscou, par des corridors ferroviaires et de développement continus. Il pourrait également catalyser une révolution éthique dans les relations internationales en remplaçant la dimension destructrice d’une concurrence à somme nulle par un progrès partagé. Associé à une approche de type Glass-Steagall (séparation entre banques commerciales et banques spéculatives) à une échelle planétaire, le projet réorienterait les investissements mondiaux vers un développement productif, inversant la désindustrialisation que l’on observe actuellement dans une grande partie de l’Europe et de l’Amérique du Nord.

En avril 2007, plusieurs centaines de personnes s’étaient réunies à Moscou pour une conférence intitulée Mégaprojets de l’Est russe : une liaison transcontinentale Eurasie-Amérique via le détroit de Béring. Deux Américains qui avaient sérieusement promu le projet, l’ancien secrétaire américain à l’Intérieur et gouverneur de l’Alaska Walter J. Hickel et Lyndon LaRouche, qui appelait à la construction de cette liaison depuis au moins 1978, y ont participé. Hickel s’est exprimé en personne lors de la conférence, et les remarques écrites de Lyndon LaRouche ont été lues par un porte-parole. Un compte rendu de la conférence avait été publié dans le numéro printemps/été 2007 de 21st Century Science & Technology.

Kirill Dmitriev, envoyé spécial de Vladimir Poutine et PDG du Fonds russe d’investissement direct, dont le post sur X du 16 octobre, établissant un lien entre le tunnel du détroit de Béring et l’ère JFK a été vu plus de 2,2 millions de fois, a lancé un concours pour réaliser la meilleure vidéo courte par IA sur le tunnel « Trump-Poutine ».

Elon Musk s’est pris au jeu en publiant une vidéo sur la proximité entre la Russie et l’Alaska.

En outre, Kirill Dmitriev s’exprimera la semaine prochaine à Riyad dans le cadre de la 9ème édition de la conférence Future Investment Initiative sur le thème « Un programme audacieux pour un monde en mutation ». Autant ce projet permettrait de rapprocher la Russie et les États-Unis dans le cadre d’une expansion nécessaire de l’économie réelle, autant il impliquerait aussi très directement le Canada et la Chine. Il est d’ailleurs significatif que la présence du vice-président chinois Han Zheng ait été annoncée.

La présentation de la conférence montre l’intérêt que suscite ce type de projet : « Réunissant les principaux dirigeants, investisseurs, innovateurs et décideurs politiques du monde entier, la FII9 servira de plateforme mondiale pour identifier des solutions concrètes et forger de nouveaux partenariats entre les gouvernements et le secteur privé. » Elle évoque également « Un programme audacieux pour un monde en mutation — Plus de 250 panels et discussions aborderont certaines des questions les plus urgentes qui façonnent notre avenir, notamment : redéfinir la prospérité et lutter contre les inégalités de revenus ; le passage au-delà du libre-échange et ses implications géopolitiques ; les partenariats public-privé favorisant une croissance durable ; la course mondiale vers le leadership en matière d’informatique quantique et d’intelligence artificielle ; les progrès et les défis de la transition énergétique. »

Parmi les personnalités attendues figurent le prince Abdulaziz bin Salman, ministre de l’Énergie du Royaume d’Arabie saoudite ; Yasir Al-Rumayyan, gouverneur du Fonds d’investissement public, président de Saudi Aramco et de l’Institut FII ; Han Zheng et le président du Rwanda, Paul Kagame.

L’appel devenu viral de Kirill Dmitriev en faveur d’un engagement créateur, les remarques d’Elon Musk, ainsi que le regain d’intérêt pour les premières études de faisabilité réalisées par la société allemande de construction de tunnels Herrenknecht et l’Académie chinoise d’ingénierie, ont ravivé l’enthousiasme du public. Herrenknecht, dont les tunneliers ont relié l’Europe et l’Asie à travers le Bosphore (tunnel Eurasia, ouvert en 2016), a confirmé que le projet était « tout à fait réalisable avec la technologie actuelle ». Venant de l’entreprise actuellement responsable des projets de tunnels les plus ambitieux d’Europe, notamment le tunnel de base du Brenner et la liaison prévue entre Gibraltar et le Maroc, ce jugement a du poids. Mais la faisabilité n’est plus la question la plus importante. Ce qui importe désormais, c’est de savoir si les nations auront le courage de passer à l’action.

Ce débat ne peut se limiter aux ingénieurs, aux investisseurs et aux politiciens. Le tunnel sous le détroit de Béring nous invite tous à repenser notre conception de l’humanité dans son ensemble : notre espèce est unique parmi les êtres vivants par sa capacité à découvrir, à construire et à créer des liens, et non pas à dominer.

Alors que les pays membres des Nations Unies relancent cette semaine la lutte pour mettre fin au colonialisme sous toutes ses formes et que l’industrie allemande appelle à un nouveau partenariat de développement avec l’Afrique, le projet Béring offre une voie concrète pour aller de l’avant.

Le tunnel et les corridors de développement constituent certes une infrastructure physique mais ils revêtent aussi une dimension morale dans le sens où ils offrent une plateforme pour construire un avenir véritablement humain.

Table ronde internationale : le projet de tunnel sous le détroit de Béring peut ouvrir une nouvelle ère de paix grâce au développement

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Le mercredi 22 octobre, Executive Intelligence Review a organisé une table ronde internationale d’urgence sur les implications stratégiques du projet de tunnel sous le détroit de Béring, qui, au cours des dernières 48 heures, a été placé au centre des relations entre les États-Unis et la Russie par les publications sur les réseaux sociaux de l’envoyé spécial du Kremlin, Kirill Dmitriev, appelant à la construction conjointe d’un tel « tunnel Poutine-Trump », et la réponse du président américain Donald Trump, qui a trouvé la proposition « intéressante » et a déclaré qu’il y réfléchirait.

Vladimir Poutine et Donald Trump doivent se rencontrer à Budapest, en Hongrie, vers la fin du mois d’octobre, afin de poursuivre leurs négociations sur la fin de la guerre en Ukraine, et la proposition de Dmitriev pourrait bien figurer à l’ordre du jour.

Dmitriev a en outre révélé dans un message publié sur les réseaux sociaux le 20 octobre que « nous avons commencé l’étude de faisabilité du tunnel Russie-Alaska il y a six mois », c’est-à-dire vers avril 2025, soit quatre mois avant le sommet historique du 15 août en Alaska entre Poutine et Trump.

Les lecteurs se souviendront qu’immédiatement avant ce sommet, la fondatrice de l’Institut Schiller, Helga Zepp-LaRouche, avait publié une déclaration urgente le 11 août : « Zepp-LaRouche appelle les présidents Trump, Poutine et Xi : le projet de tunnel sous le détroit de Béring est la politique parfaite pour éviter la guerre ». Dans ce document, Mme Zepp-LaRouche appelait Poutine et Trump à « convenir, lors de leur rencontre en Alaska le 15 août, de construire un corridor traversant le détroit de Béring et, grâce à ce projet ferroviaire et de tunnel, d’unir les réseaux ferroviaires de l’Eurasie à ceux des Amériques. Ce projet permettrait d’exploiter les vastes ressources inutilisées de la Sibérie, ainsi que les ressources arctiques américaines en pétrole, gaz, métaux précieux de toutes sortes et eau douce... [Il] pourrait devenir le programme idéal pour éviter la guerre et améliorer considérablement la prospérité du monde. » Mme Zepp-LaRouche a expliqué que « le projet de tunnel sous le détroit de Béring a été étudié et promu pendant des décennies par des personnalités scientifiques et politiques de premier plan aux États-Unis, en Russie et en Chine », y compris son défunt mari, le célèbre économiste Lyndon LaRouche.

Cet appel du 11 août comprenait un addendum de 21 pages contenant des documents historiques sur le projet de tunnel sous le détroit de Béring, publiés au fil des ans par EIR.

Mais le potentiel stratégique de cette initiative va bien au-delà du sommet Trump-Poutine. Trump rencontrera probablement aussi le président chinois Xi Jinping au cours de la même période. Les deux présidents seront en Corée du Sud vers le 30 octobre, le sommet de l’APEC étant prévu du 31 octobre au 1er novembre. Le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, rencontrera le vice-Premier ministre chinois He Lifeng en Malaisie dans environ une semaine, afin de voir si un accord suffisant peut être trouvé sur le commerce et d’autres questions pour rendre un tel sommet possible.

La Chine est depuis des décennies un fervent partisan du projet de tunnel sous le détroit de Béring, dont elle tirerait directement profit. Il serait tout à fait logique de sortir les relations sino-américaines de l’impasse de la guerre tarifaire et de s’engager sur la voie de la coopération dans le cadre d’un tel projet.

En outre, le plan Oasis de LaRouche pour le Moyen-Orient propose une approche similaire de paix par le développement pour résoudre les crises dans cette région déchirée par la guerre.

L’agence de presse russe TASS s’est maintenant tournée vers Mme Zepp-LaRouche pour obtenir une évaluation de l’importance des derniers développements. « Il est évident pour le président Trump que la normalisation des relations entre les États-Unis et la Russie ouvrira d’énormes perspectives pour le développement de la coopération économique entre les deux pays », a déclaré Mme Zepp-LaRouche à TASS confirmant que « le [projet] le plus impressionnant serait le ’tunnel Poutine-Trump’ qui, comme l’a souligné Kirill Dmitriev, PDG du Fonds russe d’investissement direct, sur les réseaux sociaux, deviendrait une liaison de 110 km entre l’Amérique et l’Afro-Eurasie à travers le détroit de Béring... Le tunnel Poutine-Trump serait l’incarnation idéale du concept de ’paix par le développement’ ».

Intervenants :

Helga Zepp-LaRouche (Allemagne), présidente de l’Institut Schiller
Scott Spencer (États-Unis), conseiller en chef du projet InterContinental Railway
Dr Viktor Razbeguine (Russie), économiste et ingénieur russe, vice-président, président de la branche russe du « Groupe interhémisphérique pour le tunnel et le chemin de fer du détroit de Béring » (depuis 1993), ancien vice-président du Conseil d’État russe pour l’étude des forces productives (SOPS) (1997-2015), associé gérant du groupe « Intel Consulting », membre correspondant des académies d’ingénierie russes et internationales.
Prof. Enzo Siviero (Italie), recteur de l’université eCampus et vice-président du SEWC (Structural Engineering World Congress), ancien professeur de construction de ponts à l’université de Venise
Dr Alexander Bobrov (Russie), docteur en histoire, chef de la division des études diplomatiques à l’Institut d’études stratégiques et de prévisions de l’université RUDN (Université de l’amitié des peuple).

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