« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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4 janvier 2025
Déclaration de l’Institut Schiller appelant à un véritable Jubilé en 2025
La veille de Noël 2024, le pape François a officiellement lancé l’année jubilaire 2025, appelant l’année à venir à être un « Jubilé d’espérance ». Le Jubilé est traditionnellement associé, dans diverses religions, à la période d’émancipation des esclaves et de remise des dettes.
Le pape a soulevé la bonne question au bon moment, pour que les catholiques, mais aussi tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté, agissent.
En ce début d’année 2025, le monde est en proie à des guerres qui s’étendent et qui menacent de dégénérer en une confrontation nucléaire entre superpuissances, à laquelle aucune ne survivra. Nous sommes également témoins d’un génocide à Gaza, dans lequel ce ne sont pas seulement des dizaines de milliers de Palestiniens qui sont tués [probablement plus de 100 000, voir plus, compte-tenu de l’impossibilité de dénombrer les morts ensevelis sous les décombres – NdlR] mais notre humanité même, alors que le monde regarde dans une incapcité, au moins apparente, d’empêcher nos gouvernements de se faire les complices de crimes contre l’humanité dont nous avions pourtant juré il y a 90 ans qu’ils ne se reproduiraient jamais plus.
Nous nous trouvons d’autre part au bord du gouffre avec le risque d’une explosion de l’ensemble du système financier transatlantique et sa bulle spéculative de plus de 2 quadrillions de dollars de dettes et de produits dérivés, illégitimes et odieux. C’est l’engagement résolu de l’Establishment occidental à maintenir ce système en faillite, quoi qu’il arrive, qui conduit l’humanité à la guerre nucléaire et à l’extension du génocide.
Ce système financier en faillite doit faire l’objet d’une réorganisation en cette année jubilaire de 2025, en effaçant de la bulle spéculative de 2 quadrillions de dollars tout ce qui est illégitime et odieux (selon le terme juridique employé par par le juriste russo-américain Alexander Nahun Sack – voir plus loin). Il s’agit là de termes à la fois moraux et juridiques, qui s’inscrivent dans le cadre du droit international, comme l’a prouvé le cas de l’Équateur en 2008. Le monde doit maintenant faire ce que le petit Équateur a fait à l’époque.
Dans l’Église catholique, les jubilés ordinaires ont lieu tous les 25 ans. Le dernier a été annoncé en 2000 par le pape Jean-Paul II. Dans le cadre de son vaste appel à la justice, les forces de la société civile de nombreux pays, dont l’Équateur, ont commencé à étudier et à remettre en question la validité de la dette imposée aux pays du secteur en développement. En juillet 2007, le gouvernement équatorien a convoqué une Commission pour l’audit complet du crédit public (CAIC), qui a conclu, après une étude exhaustive de 18 mois, que la dette extérieure commerciale de l’Équateur avait fonctionné comme un mécanisme de pillage illégitime et illégal entre 1976 et 2006, passant de 16 millions de dollars en 1976 à 4,2 milliards de dollars en 2006, malgré un transfert net aux créanciers de 7,1 milliards de dollars en paiements d’intérêts et de capital sur cette période de 30 ans. C’est ce qu’on appelle « l’arithmétique des banquiers » : 16 - 7100 = 4200.
En 2008, s’appuyant sur cette étude, le gouvernement équatorien a annoncé un moratoire unilatéral sur la dette et a imposé une « décote » de 70 à 80 % à ses détenteurs d’obligations. Wall Street et la City de Londres ont crié et hurlé, mais l’exigence morale et la légalité étaient toutes deux du côté de l’Équateur.
L’expression « dette odieuse » est un terme juridique qui a été créé en 1927 par le juriste russo-américain Alexander Nahun Sack, qui a fondé ses conclusions sur deux études de cas : la dette imposée au Mexique par l’invasion et l’occupation de ce pays par l’empereur Maximilien des Habsbourg au milieu du XIXe siècle, dette qui a été répudiée par le plus grand président du Mexique, Benito Juárez, avec l’aide d’Abraham Lincoln ; et le cas de Cuba, au début du XXe siècle, qui a obtenu son indépendance de l’Espagne et de la dette qu’elle avait imposée à sa colonie insulaire. Sack a écrit dans Les Effets des transformations des États sur leurs dettes publiques et autres obligations financières : Traité juridique et financier (Recueil Sirey, 1927) :
La raison pour laquelle ces dettes ’odieuses’ ne peuvent être considérées comme grevant le territoire de l’État, est que ces dettes ne répondent pas à l’une des conditions qui déterminent la régularité des dettes d’État, à savoir celle-ci : les dettes d’ État doivent être contractées et les fonds qui en proviennent utilisés pour les besoins et dans les intérêts de l’ État. Les dettes ’odieuses’, contractées et utilisées à des fins lesquelles, au su des créanciers, sont contraires aux intérêts de la nation, n’engagent pas cette dernière (...).
Des institutions internationales telles que la CNUCED ont par la suite publié des études reconnaissant la validité de l’argument de Sack, comme l’essai de juillet 2007 intitulé The Concept of Odious Debt in Public International Law (La notion de dette odieuse en droit international public) du professeur Robert Howse, professeur de droit à la faculté de droit de l’université du Michigan.
Le célèbre économiste et homme d’État américain Lyndon LaRouche a fait remonter ce même concept - l’exigence que la dette serve le bien-être général - aux fondateurs du système économique américain. Dans un discours prononcé en janvier 2011, LaRouche a déclaré :
Une dette honnête envers l’avenir ne peut être payée que par la création honnête d’une richesse physique équivalente dans le futur, ce qui inclut le développement des pouvoirs créatifs de chaque citoyen, de chaque enfant et de chaque adolescent. Les dettes générées par un système de crédit sont remboursées par la prolificité de la production future, ce qu’avaient déjà compris les Winthrops et les Mathers de la colonie du Massachusetts. Ces dettes obligent le gouvernement à limiter leur accumulation à la partie efficace de son engagement à promouvoir la production. Légalement, elles ne peuvent être contractées que sur la base d’une création accrue de richesses physiques et d’une croissance de la productivité physique de la nation. Toute dette contractée à la suite d’une spéculation financière n’a aucune légitimité aux yeux d’un gouvernement. C’est ainsi que l’on peut décrire en termes simples le grand principe de Hamilton, qui est implicite dans l’intention du préambule de notre Constitution. Les dettes sont bonnes lorsqu’elles sont conçues pour être bonnes, comme dans le cas d’un système de crédit qui repose sur l’engagement d’augmenter la création nette de richesse par personne et par kilomètre carré du territoire d’une nation.
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C’est cette approche - qui a également guidé le traité de Westphalie de 1648, y compris ses dispositions relatives aux moratoires sur la dette - qui doit maintenant être appliquée globalement en cette année du Jubilé, afin de débarrasser le monde du poison de l’usure une fois pour toutes, et avec elle de la menace de la guerre et du génocide. Cela ouvrira la voie à l’organisation d’un nouveau paradigme fondé sur une nouvelle architecture internationale de sécurité et de développement, afin de permettre l’émission de bons crédits pour la noble cause du développement économique mondial.