« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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27 décembre 2023
Message de Noël et du Nouvel an d’Helga Zepp-LaRouche
Nul ne pourra prétendre, comme les historiens l’ont fait pour la Première Guerre mondiale, que nous sommes entrés dans la Troisième Guerre mondiale comme des somnambules. Les cris de guerre d’aujourd’hui sont si assourdissants qu’ils menacent de réveiller toutes les victimes des précédents conflits, y compris la Première et la Seconde Guerre mondiale.
L’argent des contribuables est déversé dans des dépenses militaires de toutes sortes, tandis que les économies civiles s’effondrent, que les infrastructures se dégradent et que les écoles et les hôpitaux sont fermés ou en ruines. Aux États-Unis, le budget de la défense du Pentagone pour 2024 s’élève à près de mille milliards de dollars, tandis que l’ensemble du budget de l’Union européenne et tous les budgets nationaux en Europe sont consacrés à la militarisation. Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, exige que l’on « se prépare à la guerre », affirmant qu’il ne nous reste que cinq à huit ans avant un conflit militaire majeur avec la Russie. Les groupes de réflexion américains travaillent fébrilement sur des « jeux de guerre » en vue d’un affrontement majeur avec la Chine, qui devrait, selon eux, avoir lieu le plus tôt possible. (Voir l’article de Foreign Affairs, le magazine du Council of Foreign Relations, « The Big One : Preparing for a Long War With China ».)
Comment en sommes-nous arrivés sur une telle trajectoire, qui ne peut que nous conduire à une troisième guerre mondiale, c’est-à-dire à une guerre nucléaire globale entre les États-Unis et l’OTAN d’un côté, et la Russie et la Chine de l’autre, et donc à l’Armageddon nucléaire ? En 1961, à la fin de son mandat, le président Eisenhower mettait en garde contre l’explosion du pouvoir du complexe militaro-industriel (CMI) : « Dans les conseils gouvernementaux, nous devons nous prémunir contre l’acquisition par le complexe militaro-industriel d’une influence injustifiée, qu’elle soit recherchée ou non. Car la montée désastreuse d’un pouvoir qui n’est pas à sa place est un risque qui existe et persistera. »
Depuis, l’histoire a malheureusement montré que le conseil d’Eisenhower n’a pas été suivi et que cette « influence injustifiée » s’est répandue dans toute la société et a réduit les gouvernements à des institutions obéissant aux ordres du CMI.
Le tournant décisif s’est produit avec la dissolution de l’Union soviétique. Au lieu d’établir un nouvel ordre mondial de paix, comme l’avait envisagé Lyndon LaRouche avec sa proposition de Pont terrestre eurasiatique, qui aurait intégré économiquement le continent eurasien et resserré les liens entre l’Est et l’Ouest, les néoconservateurs ont opté pour la domination anglo-américaine d’un monde unipolaire. La doctrine Wolfowitz de 1992 stipulait qu’on ne devait jamais autoriser aucun pays ou groupe de pays à surpasser les États-Unis en termes de puissance politique, économique ou militaire.
Contrairement aux promesses faites au dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev au moment de la réunification allemande, selon lesquelles l’OTAN ne s’étendrait pas d’un « pouce » vers l’Est, c’est pourtant bien ce qu’elle a fait. L’OTAN a procédé à cinq expansions de 1000 km vers l’Est, en direction des frontières russes, notamment en installant des systèmes de défense antimissile potentiellement offensifs dans cette zone, qui ont toutes précédé l’opération spéciale russe du 24 février 2022 en Ukraine. Une nouvelle crise des missiles de Cuba se développant à un rythme d’escargot, en quelque sorte.
Les États-Unis et les pays de l’OTAN ont opté pour le contrôle politique, pour l’idée que tous les pays du monde devaient adopter le modèle néolibéral occidental, fait de changements de régime, révolutions de couleur, guerres interventionnistes causant des millions de morts, implantation de bases militaires dans le monde entier, entraînement à la guerre de leurs alliés étrangers, expansion impériale de l’UE et de l’OTAN, jusqu’à la création d’une OTAN mondiale comme moyen de contenir les rivaux réels et potentiels, sanctions visant à provoquer un changement de régime et, enfin, militarisation du dollar. Tout cela sous la bannière de « l’ordre fondé sur des règles », de la démocratie libérale et des droits de l’homme.
La Chine, au contraire, s’est concentrée d’abord sur le développement économique et la lutte pour sortir de la pauvreté 850 millions de ses propres citoyens, puis, de plus en plus, sur une coopération gagnant-gagnant avec les nations du Sud par le biais de l’initiative de la Nouvelle Route de la soie. Grâce à cette coopération, ces pays ont eu pour la première fois la possibilité de se libérer de la pauvreté et du sous-développement hérités de l’époque coloniale. Aujourd’hui, 150 pays du Sud collaborent avec la Chine dans des milliers de projets liés à la Nouvelle Route de la soie : construction de routes et de lignes ferroviaires à grande vitesse, ports, aéroports, corridors de développement, parcs industriels, etc.
Au cours des dix dernières années, depuis que la Chine a mis l’initiative « la Ceinture et la Route » à l’ordre du jour, un optimisme culturel sans bornes s’est répandu parmi les nations du Sud, devenues depuis longtemps la majorité mondiale, avec l’idée qu’elles deviendront bientôt des nations pleinement développées. Elles répondent à la militarisation du dollar par la dédollarisation, c’est-à-dire en échangeant dans leurs propres monnaies et en planifiant à terme leur propre devise de réserve, en renforçant le partenariat stratégique entre la Russie et la Chine, en créant leurs propres organisations, telles que les BRICS Plus, qui comptera dix membres au 1er janvier 2024 et en accueillera des dizaines d’autres très bientôt.
Conclusion : la tentative de répondre à la désintégration de l’Union soviétique par l’utopie d’un ordre mondial unipolaire, maintenu par la puissance militaire, a été un échec monumental. Elle a conduit à un retour de flamme stratégique sans précédent.
La question cruciale est donc : l’Occident, les États-Unis et les nations européennes peuvent-ils corriger leur trajectoire politique à temps et choisir la coopération avec le Sud au lieu de l’affrontement ? Comme la Chine et la Russie l’ont souligné à maintes reprises, l’initiative « la Ceinture et la Route » et les pays BRICS sont ouverts à la coopération avec l’Occident !
La principale difficulté réside dans le fait qu’une grande partie des capacités économiques des États-Unis, et une part croissante de celles de l’Europe, ont été reprises par le CMI et sont si étroitement liées aux grandes sociétés d’investissement et de gestion d’actifs de Wall Street et de la City de Londres, qu’il faudrait plutôt parler de complexe militaro-industriel-financier (CMIF). [1]
Techniquement parlant, il serait relativement facile de réorienter ces capacités à des fins civiles et, plutôt que de produire des bombardiers, des avions de chasse et des missiles, de lancer la production de systèmes ferroviaires modernes à grande vitesse, de réacteurs nucléaires de quatrième génération intrinsèquement sûrs et de réacteurs à fusion nucléaire, ainsi que de stations spatiales pour les voyages internationaux dans l’espace. En d’autres termes, la capacité industrielle actuellement utilisée pour détruire toute valeur physique réelle (car à quel autre usage sont destinés les systèmes d’armement ?) pourrait permettre de produire des biens utiles au service du bien commun. Au lieu de chars et de munitions, elles pourraient permettre de construire des écoles et des hôpitaux et aider nos nations à retrouver des économies prospères !
L’économiste russe Sergei Glazyev l’a résumé dans un message à l’occasion de ce qui aurait été le 100e anniversaire de Lyndon LaRouche, qu’il n’a malheureusement pas vécu pour le lire. LaRouche a non seulement prévu avec clairvoyance la crise du système néolibéral, mais il a également proposé des solutions pour surmonter cette crise. Les pays qui ont rejeté ses solutions sont aujourd’hui en crise, tandis que ceux qui ont mis en œuvre ses idées prospèrent, a reconnu M. Glazyev dans son message : « Dans pratiquement tous les grands pays du monde qui se développent aujourd’hui avec succès - surtout l’Inde et la Chine - il y a des partisans de LaRouche. Ils ont utilisé ses pensées et ses idées pour créer leurs miracles économiques. Ce sont les principes de l’économie physique défendus par LaRouche qui sous-tendent aujourd’hui le miracle économique chinois et qui sont à la base de la politique de développement économique de l’Inde. Les partisans de LaRouche dans ces pays exercent une influence fructueuse, très positive et constructive sur l’élaboration de la politique économique dans ces nations leaders du nouveau paradigme économique mondial. »
Il n’est pas encore trop tard. Nous devons remplacer les cris de guerre appelant à toujours plus d’armes par un retour à la diplomatie et à l’idée que nous pouvons - et devons - résoudre tous les conflits par la négociation, si nous voulons éviter une guerre nucléaire mondiale et un hiver nucléaire, qui effacerait tout souvenir de l’existence de l’humanité.
Au lieu de l’avidité des spéculateurs du CMIF, de Wall Street et de la City de Londres, dont les taux de profit élevés dépendent de l’argent des contribuables déversé dans de nouvelles guerres, nous devons défendre les intérêts vitaux de la population : ceux des agriculteurs, des petites et moyennes entreprises, des conducteurs de train, des boulangers, etc.
Transformons les épées en socs de charrue !
Nous sommes nombreux, ils ne sont qu’une poignée !
Pour une coopération avec les nations du Sud !
[1] Voir documentation sur le CMIF : https://larouchepub.com/eiw/public/2023/eirv50n50-20231222/eirv50n50-20231222-offprint-military-financial-complex.pdf