« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller

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Comment Merkel et Hollande ont attisé la guerre en Ukraine

17 janvier 2023

Les aveux d’Angela Merkel et de François Hollande sur l’intention véritable des accords de Minsk est un véritable coup de théâtre. Ils révèlent le degré de duplicité et de malhonnêteté auxquels sont descendus les Occidentaux.
Il était donc nécessaire, avec la conférence du 10 janvier, non seulement d’exprimer l’indignation àface cette politique assumée du mensonge qui, pour le « reste » du monde, est désormais associée aux pays occidentaux mais, surtout, de montrer les conséquences tragiques qu’elle risque d’entraîner.

Liste des orateurs :

  • Ray McGovern, cofondateur des Veteran Intelligence Professionals for Sanity (VIPS)
  • Scott Ritter, ancien inspecteur de l’Unscom en Irak
  • Helga Zepp-LaRouche, fondatrice de l’Institut Schiller et présidente du Mouvement pour les droits civiques-Solidarité (BüSo)
  • Général Dominique Delawarde (cr), ancien officier de liaison français au Collège des officiers de l’armée américaine à Fort Leavenworth
  • Colonel Alain Corvez (er), conseiller en matière de sécurité

Un débat particulièrement profond et décisif a eu lieu lors de la conférence organisée le 10 janvier par l’Institut Schiller, sur le thème de la violation, par les anciens chefs d’Etats allemand et français Angela Merkel et François Hollande, de leurs obligations dans les Accords de Minsk, dont ils étaient cosignataires avec la Russie et l’Ukraine dans ce qu’on a appelé le « format Normandie ».

Ces accords, signés en 2014-2015 dans le but de rétablir la paix en Ukraine par l’arrêt des combats et par un changement constitutionnel devant accorder une certaine autonomie aux régions russophones du Donbass (Donetsk et Lougansk), furent par la suite approuvés, leur donnant force de loi, par le Conseil de Sécurité de l’ONU, le 15 juillet 2015.

Or, le 7 décembre 2022, dans un entretien à Die Zeit, Angela Merkel avoua que les Accords de Minsk n’avaient été, en réalité, qu’une tentative pour « donner du temps à l’Ukraine » pour s’armer. L’Ukraine « a également utilisé ce temps pour devenir plus forte, comme on peut le voir aujourd’hui. L’Ukraine de 2014-2015 n’est pas l’Ukraine d’aujourd’hui (…) Début 2015, Poutine aurait facilement pu les envahir. »

Le 28 décembre, ce fut au tour de François Hollande de confirmer ces dires, dans une interview au journal Kyiv Independent : « Oui, Angela Merkel a raison sur cette question. Depuis 2014, l’Ukraine a renforcé ses positions militaires (…) Ce fut le mérite des accords de Minsk d’avoir donné à l’Ukraine l’opportunité de faire cela ! »

Seul surpris par ces déclarations, Vladimir Poutine, qui, depuis Bichkek, déclarait le 9 décembre : « Franchement, c’était une surprise totale pour moi. C’est décevant ! (…) La confiance est déjà proche de zéro, mais après de telles déclarations, la question de la confiance devient principale. Que pouvons-nous négocier, sur quoi pouvons-nous encore être d’accord ? »
Rappelons que la non-application de ces accords a conduit, entre 2014 et 2022, à la mort d’au moins 14 000 habitants de la région du Donbass...

Le rôle de la confiance

Nous voilà donc arrivées à la question centrale de cette conférence, comme l’a dit Helga Zepp-LaRouche dans son discours introductif : « Nous avons atteint le point d’affrontement total, et suite à une longue série événements, la Russie est désormais persuadée qu’il n’y a personne en Occident digne de confiance pour négocier. Dans ces conditions, pour elle, l’issue de cette guerre ne peut se décider que sur le champ de bataille. (…) La position de l’OTAN est que l’Ukraine doit l’emporter, coûte que coûte, même si cela implique la destruction du pays tout entier et de toute sa population. »

L’ambassadeur ukrainien à Londres, Vadym Prystaiko, ne l’a pas caché dans un entretien avec Newsweek : « Nous sommes en guerre depuis presque un an maintenant, a-t-il dit. Nous perdons des gens à gauche et à droite. Nous ne publions pas combien de morts sont militaires ou civils, mais vous pouvez imaginer que les chiffres sont énormes, indigestes. Quant aux villes, certaines d’entre elles sont totalement détruites. L’Occident a maintenant une chance unique, a-t-il ajouté. Il n’y a pas beaucoup de nations dans le monde qui se permettraient de sacrifier autant de vies, de territoires et de décennies de développement dans le but de vaincre l’ennemi juré. »

L’hypocrisie de Mme Merkel a été totale, dans cette affaire, a dénoncé Helga LaRouche, énumérant le nombre de discours officiels qu’elle a prononcés, où elle rappelait même que la levée des neuf trains de sanctions contre la Russie était conditionnée à la mise en œuvre des Accords de Minsk !

La capitulation totale

Après Mme LaRouche, d’anciens militaires ou spécialistes du renseignement ont exprimé leur vision de la fin de la guerre : l’ancien analyste dissident de la CIA Ray McGovern, co-fondateur des VIPS (Vétérans du renseignement pour la santé mentale), Scott Ritter, ancien inspecteur de l’ONU sur le désarmement en Irak, le général Dominique Delawarde, ancien officier de liaison avec le Collège d’officiers de l’Armée américaine de Fort Leavenworth, Kansas, et le colonel Alain Corvez (cr), consultant international sur les questions stratégiques (tous deux français).

C’est Scott Ritter qui a le mieux exprimé leur réticence à une négociation de paix hâtive, où la Russie ne serait pas en mesure « d’imposer ses conditions légitimes », car, après tout, c’est le refus occidental d’accepter les traités proposés par la Russie en décembre 2021, rejetant catégoriquement l’entrée de l’Ukraine voisine dans l’OTAN et le déploiement par l’Alliance d’armes de destruction massive à ses frontières – exigences qui ne sont en rien démesurées – qui est à l’origine de cette guerre.

Sur la question des négociations, Ritter a dit « avoir perdu confiance en l’Occident pour se comporter comme un partenaire responsable de la paix (…) Merkel est une menteuse (…) Nous demanderions donc à la Russie de traiter avec des menteurs, de mettre en jeu les intérêts de sa sécurité nationale en espérant que les menteurs ne mentent plus. C’est une proposition irresponsable et irréaliste du point de vue de la Russie.

« La situation en Ukraine se résoudra sur le champ de bataille, et la Russie est d’accord. (…) A la fin, elle organisera la capitulation, dans le style de celle qui a eu lieu dans la baie de Tokyo en septembre 1945, sur le pont du Missouri, où l’ennemi japonais vaincu a dû choisir entre signer sa reddition inconditionnelle ou mourir. La Russie donnera à l’Ukraine ce même choix.
Je ne dis pas que l’intervention du Vatican ne pourra pas fonctionner ou qu’il faille l’oublier, je dis simplement que le moment est mal choisi. Le Vatican pourrait être ce lieu neutre où un nouveau cadre de sécurité européen pourrait être élaboré, entre une Russie victorieuse et un Occident vaincu. Mais on n’aura aucune chance d’aboutir à ce stade tant que l’on n’aura pas éradiqué pour toujours ce conflit cancéreux (…). Et seule la Russie peut le faire. »

Le général Dominique Delawarde (cr) a abondé dans le même sens, rappelant que le 15 avril 2019, le secrétaire d’Etat Mike Pompeo s’était vanté, à l’Université du Texas, que la CIA avait été une école de mensonge : « A la CIA, on a menti, trompé, volé ; on a eu des cours entiers d’entraînement pour cela. ».

La confiance ne peut être rétablie, selon le Général Delawarde, que par « l’éviction des néoconservateurs mondialistes, liés aux puissances d’argent qui font la pluie et le beau temps dans les élections états-uniennes, présidentielles ou législatives, et celle-ci n’est pas envisageable tant les moyens financiers consacrés à la conquête et à ‘l’exploitation’ du pouvoir sont immenses. La Russie de Poutine doit aujourd’hui faire tout ce qui est possible pour briser ce rêve en affaiblissant l’aigle occidental et en lui coupant les ailes. »

Cette opposition frontale apparente entre, d’un côté, la vision de Mme LaRouche cherchant à élever le débat à un niveau où la vision d’un avenir meilleur pour l’humanité puisse ouvrir de nouvelles conditions pour une paix négociée, et de l’autre, la vision militaire, contrainte aujourd’hui de terrasser un dragon qui menace l’existence même de nos nations, n’est-elle pas le propre des orientations du politique d’un côté, des chefs de guerre de l’autre, les deux devant aller de pair ?

Quels éléments extérieurs et nouveaux pourraient contribuer à changer la donne ? Le général Delawarde évoque le rôle fondamental que jouera l’économie dans cette guerre, faisant le pari que la plus grande résilience de l’économie russe, riche en matières premières et bien gérée financièrement, pourra finalement s’imposer à un Occident au bord d’une crise financière et énergétique majeure.

Le colonel Alain Corvez, de son côté, a dénoncé le fait, particulièrement odieux, que « les USA et l’OTAN utilisent les vies ukrainiennes pour maintenir leur hégémonie mondiale ». Il estime néanmoins que lors du récent voyage du président Zelenski aux Etats-Unis, d’autres sons de cloche se sont fait entendre. Le 21 décembre, le New York Post rapportait les propos suivants : « Biden affirme qu’armer l’Ukraine avec du matériel de pointe pourrait faire éclater l’OTAN. » C’est un signe, pour lui, que certains Américains, voyant l’effet boomerang qu’ont eu en Occident les sanctions antirusses, et le fait que l’ordre mondial leur échappe en faveur d’un nouvel ordre économique mondial créé autour des BRICS et de l’OSC, conseillent à la présidence de mettre fin à la guerre.

Ces Américains en concluent que nous devons trouver une solution honorable à la guerre. Helga Zepp-LaRouche a parlé de l’initiative du Vatican et je pense que Rome pourrait être un lieu utile pour essayer d’avoir des négociations pacifiques. Mais comme l’a dit le général Delawarde, les négociations pacifiques doivent être menées sous les conditions russes.

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