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Le beau cadeau d’Ursula von der Leyen à Joe Biden

5 avril 2022

Le contrôle des données est devenu un enjeu de pouvoir politique et économique. L’accord dont se vantent Joe Biden et Ursula von der Leyen ressemble fortement à un accord de dupes dont les Européens feront les frais, en toute unilatéralité.

Le scandale des écoutes de la NSA [1], les données de l’Education nationale, du ministère de la Défense (hors gendarmerie), de la santé offerts à Microsof, l’utilisation du logiciel américain Palentir par nos services de renseignements, ne suffisaient pas. Aux choix dramatiques faits à l’échelle nationale concernant les données personnelles (voire d’autres types de données confidentielles) des Français, viendront bientôt s’ajouter les choix de l’Union européenne signant la capitulation de tout ce que l’on pouvait espérer d’indépendance européenne dans ce domaine face au désir de domination anglo-américaine.

En effet, les militaires français mettent en garde contre les dangers de l’accord conclu vendredi 25 mars entre le président américain Joe Biden et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Les deux parties, lors d’une conférence de presse commune à Bruxelles, ont déclaré avoir trouvé un accord politique sur les transferts internationaux de données. La conférence de presse s’est déroulée dans « un climat politique d’unité transatlantique », après une série de sommets réunissant les dirigeants de l’UE, de l’OTAN et du G7 « pour définir une réaction commune » à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Un accord antérieur, appelé Privacy Shield Deal, avait été invalidé par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) en juillet 2020.

Depuis, Washington s’est démené pour proposer une base juridique pour un nouvel accord. En bref : Ashcroft en a rêvé, Von der Leyen l’a fait. Pour Luca Bertuzzi, auteur d’un article Biden et Von der Leyen annoncent un accord « de principe » sur les flux de données transatlantiques , sur le site Euractiv, « la question centrale est celle des lois américaines sur la surveillance, qui permettent aux services de renseignement d’accéder aux données personnelles avec peu d’examen et sans possibilité de redresser la situation ».

« Il est particulièrement consternant que les États-Unis aient prétendument utilisé la guerre contre l’Ukraine pour pousser l’UE sur cette question économique », a déclaré Max Schrems, le militant de la vie privée à l’origine des deux décisions de justice homonymes. « Nous nous attendons à ce que cette affaire revienne devant la Cour dans les mois qui suivent une décision finale. »

« Nous avons réussi à trouver un équilibre entre la sécurité et le droit à la vie privée et à la protection des données », affirme Mme von der Leyen. A tout le moins, le contexte de guerre et de dépendance de l’Europe envers les Etats-Unis dans lequel se fait cet accord, tout comme les états de service de M. Biden et Mme von der Leyen, risquent de jeter un doute sérieux quant à l’honnêteté du « deal ».


Notes

[1de 2006 à 2012, trois présidents français ont été sous écoutes de la National Security Agency (NSA) américaine, mais aussi des dirigeants étrangers comme Angela Merkel. Des milliers d’autres citoyens ont été sous écoute, à leur insu.

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