« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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26 août 2017
La proposition de loi sur les sanctions visant la Russie, l’Iran et la Corée du Nord, adoptée presque à l’unanimité par le Congrès américain fin juillet, est une violation flagrante non seulement du droit international, dans la mesure où elle décrète que le droit américain s’applique aussi à l’étranger, mais aussi de la Constitution américaine, puisqu’elle restreint le pouvoir du président de définir la politique étrangère et de la mettre en œuvre. Son intention est clairement de torpiller les efforts de Donald Trump pour améliorer les relations avec la Russie, comme il l’avait fait lors du sommet du G20, ce qui, par extension, augmente dangereusement le danger de guerre.
Le texte de loi prévoit aussi des sanctions contre des entreprises non américaines engagées dans la construction d’infrastructures russes d’exportation d’énergie vers l’Europe. Il vise plus spécialement le projet Nord Stream 2 pour transporter le gaz naturel de la Russie vers l’Allemagne via un nouveau gazoduc.
Le président Trump a ratifié le texte parce qu’il n’aurait pas eu les voix nécessaires pour empêcher les deux chambres de passer outre son éventuel veto en revotant le même texte à une majorité des deux tiers. Toutefois, après avoir signé, il a tweeté qu’à cause de la nouvelle loi, « nos relations avec la Russie sont à un niveau plus bas et plus dangereux que jamais. Vous pouvez en remercier le Congrès ».
Dans sa déclaration de ratification, Trump a relevé « nombre de dispositions clairement anticonstitutionnelles », en particulier concernant l’autorité du Président de traiter avec les gouvernements étrangers. Son administration prendra en considération « les préférences exprimées par le Congrès (...) et les mettra en œuvre conformément à l’autorité constitutionnelle du Président de conduire les relations étrangères ». La nouvelle loi interdit expressément au Président de lever ou d’assouplir des sanctions adoptées par le Congrès sans l’accord préalable des deux Chambres.
Le Premier ministre russe Medvedev a déclaré avec amertume sur Facebook qu’il a peu d’espoir dans l’amélioration des relations américano-russes, mais le président Poutine, de son côté, a tenu des propos plus nuancés. La coopération se poursuit en effet sur des sujets clés comme la Syrie ou la Corée du Nord. Les Chinois, qui sont indirectement visés par la section sur les sanctions contre Pyongyang, ont exprimé leur volonté d’aider, le cas échéant, la Russie à surmonter les conséquences économiques des nouvelles mesures. Les relations russo-chinoises en général, comme le soulignent les gouvernements des deux pays, n’ont jamais été aussi bonnes.
Ainsi, bien que l’appareil du deep state, avec le soutien du Congrès, ait remporté cette bataille partielle contre l’administration Trump, la guerre continue. La communauté du renseignement, par le biais du Conseiller spécial Robert Mueller, un ancien directeur du FBI, a ouvert une nouvelle enquête au grand jury dans l’espoir de découvrir (ou d’inventer ?) des éléments de collusion entre l’équipe Trump et Moscou, vu son échec à en produire depuis un an. La Maison Blanche, de son côté, entend poursuivre les « responsables de fuites » à tous les niveaux du gouvernement et continuer à « nettoyer les écuries d’Augias » à Washington. Par ailleurs, les signaux envoyés par l’administration sont souvent contradictoires, comme en témoignent les diatribes antirusses du vice-président Pence lors de sa tournée en Europe de l’Est.
Précisons que le récent mémorandum du VIPS, montrant que l’histoire du Russiagate est un montage, constitue l’arme la plus efficace que la Maison Blanche pourrait brandir pour faire capoter la tentative de coup contre le président élu et éloigner le danger de guerre.