« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller

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« L’esprit de Singapour » pour résoudre les problèmes internationaux

Conférence internationale de l’Institut Schiller à Bad Soden

11 juillet 2018

La conférence de l’Institut Schiller à Bad-Soden, près de Francfort, les 30 juin et 1er juillet derniers, a été un franc succès. Près de 300 personnes venant de toute l’Europe ont entendu les discours d’Helga Zepp-LaRouche, présidente internationale de l’Institut, et d’experts russes, chinois, européens, africains et moyen-orientaux présentant des alternatives pour créer un nouveau paradigme de paix par le développement économique.

Parmi ces problèmes urgents : la crise des migrants qui menace l’UE d’implosion politique, quel nouvel ordre mondial pour remplacer l’actuel qui nous conduit à la faillite financière et à la guerre, l’industrialisation de l’Afrique, la reconstruction de la Syrie et du Yémen, ravagés par les guerres occidentales ; enfin, quelle culture et quelle philosophie pour rétablir l’harmonie parmi les nations et inciter les hommes à développer leurs pouvoirs créateurs ?

Pour Helga Zepp-LaRouche, la percée du sommet Trump/Kim Jong-un prouve que si les grandes puissances, Russie, Chine et Etats-Unis notamment, adoptent un agenda de paix par la coopération économique, il est possible de transformer, très rapidement, une relation entre ennemis mortels en coopération tournée vers l’avenir des nations. A la veille du sommet Trump/Poutine, elle a plaidé pour que cet « esprit de Singapour » prime désormais dans les relations internationales.

Dans cet esprit, elle proposa un sommet UE- Afrique-Chine, afin d’organiser une coopération tripartite pour assurer un développement rapide des économies africaines, éliminant ainsi, à la source, la cause de ces migrations. C’est en s’élevant à un niveau supérieur qu’on peut surmonter ce qui, au niveau local, peut apparaître comme des contradictions insurmontables, a-t-elle dit, évoquant le concept de Nicolas de Cues de « coïncidence des opposés ». Une meilleure compréhension des courants culturels peut contribuer à établir des relations fructueuses entre les peuples, à l’image de celle qui régna durant des siècles entre le confucianisme chinois et l’humanisme européen.

Quel nouvel ordre international ?

Sur la question brûlante de l’alternative à l’ordre « unipolaire » actuel, les experts russes et chinois ont rapporté l’état de la réflexion dans leurs pays. Pour Vladimir Morozov, de l’Institut russe des relations internationales (RIAC), l’idée de « multipolarité », très en vogue, n’est pas la solution idéale. Elle n’est qu’une autre version du Congrès de Vienne du XIXe siècle, un ordre mondial dominé par l’équilibre entre différents centres de pouvoir, en compétition pour des ressources mondiales limitées et ne prenant jamais en compte l’intérêt des petits pays. Le multilatéralisme serait, selon lui, une meilleure alternative, la différence essentielle étant qu’il s’agit là d’un équilibre entre les intérêts des nations plutôt qu’entre les pouvoirs.

Selon le Dr Xu Jian, vice-président de l’Institut chinois des études internationales (CIIS), deux piliers fondent la politique étrangère de la Chine : le nouveau monde devra reposer sur la construction d’« une communauté de futur partagé pour l’humanité », caractérisée « par le respect mutuel, l’honnêteté, la justice et une coopération gagnant-gagnant ». Pour relever cet immense défi, cependant, la Chine et les Etats-Unis doivent éviter trois pièges : celui de Thucydide, selon lequel « une guerre peut éclater lorsqu’une puissance établie, comme les Etats-Unis, se sent menacée par l’émergence d’une autre puissance comme la Chine » ; le piège de Kindleberger, devant le danger qu’une nation montante ne soit pas en mesure d’assurer sa fonction de nation dominante et ouvre ainsi la porte au chaos. Et celui d’une nouvelle guerre froide, si les deux nations n’améliorent pas leur confiance stratégique mutuelle et n’estompent pas les contradictions idéologiques.

Intervenant depuis les Etats-Unis par vidéo, deux personnalités politiques américaines ont clos ce tour d’horizon sur la politique des trois grandes puissances : Richard Black, sénateur de Virginie, et Roger Stone, stratège au Parti républicain et collaborateur de Donald Trump depuis 40 ans. Le premier s’est livré à un véritable réquisitoire contre la politique de son pays en Syrie ; le second a confirmé que l’accusation de collusion avec la Russie, lancée contre le Président américain, visait à l’empêcher de mettre fin, comme il l’avait promis durant sa campagne, à l’ordre mondial de guerres perpétuelles des Bush-Obama-Clinton, et d’aller vers une coopération accrue avec la Chine et la Russie.

Alain Corvez, consultant international français, a montré que le refus des Etats-Unis d’abandonner l’ordre unipolaire, notamment au Moyen-Orient où ils s’en prennent désormais à l’Iran, était un facteur de guerre très réel. Le juriste Hans Koehler, président de l’IPO (International Progress Organisation) a plaidé pour un retour au droit international : ceux qui ont lancé des guerres illégales doivent être jugés devant les tribunaux. Le lieutenant-colonel (cr) Ulrich Scholz, ancien responsable à l’OTAN, a plaidé dans le même sens.

L’avenir de l’Europe

Une troisième table ronde consacrée à la situation en Europe, fut ouverte par Jacques Cheminade. Le président de Solidarité & Progrès et ancien candidat présidentiel n’a pas eu de mots assez durs pour qualifier l’UE, où il ne s’est pas trouvé un seul pays ni dirigeant politique pour voir que seule une politique de coopération en Afrique, menée en coopération avec l’Europe et la Chine, était en mesure de résoudre le problème des migrations. L’Europe devrait pour cela s’inspirer du Tianxia chinois, où la réalisation d’un grand objectif amène les nations à travailler en « complémentarité ».

Marco Zanni, eurodéputé italien membre de la Ligue a énuméré les échecs de l’UE, dans les finances, la sécurité et l’immigration, et son incapacité à rétablir la croissance depuis 2010. L’alternative ? Aller vers moins d’intégration, et non vers davantage, et regarder du côté du modèle chinois. Le professeur italien d’économie Michele Geraci, qui devait aussi intervenir dans cette table ronde, n’a pu le faire car il a entretemps été nommé ministre.

La Nouvelle Route de la soie en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe : perspectives et réalités

Deux tables rondes furent consacrées aux changements déjà en cours grâce aux Nouvelles Routes de la soie et à des propositions de grands projets pouvant s’y ajouter.

Wang Hao, premier secrétaire économique de l’ambassade de Chine en Allemagne, a plaidé pour que l’Allemagne, premier partenaire commercial de la Chine, mais aussi l’Europe, rejoignent la Nouvelle Route de la soie, étant donné les ressources limitées de la Chine.

Trois orateurs africains, Yusuf Maitama Tuggar, ambassadeur du Nigéria en Allemagne, Mohammed Bila, de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT), et Amzat Boukari-Yabara, secrétaire général de la Ligue panafricaine-Umoja, se sont ensuite exprimés sur la coopération tripartite Chine-Afrique-Europe. Le premier a incité le public à ne pas regarder la relation Chine/Europe à travers les lunettes de la géopolitique, « un vestige de la Guerre froide ». Ce qu’il nous faut pour réussir, a-t-il dit, c’est « une coopération à trois ». Le deuxième a présenté le projet Transaqua pour la remise en eau du lac Tchad, s’inscrivant dans cette coopération. Quant au troisième, il a estimé que les critiques des Occidentaux contre la présence chinoise en Afrique, jugée excessive, étaient motivées par le déclin de leur influence dans ces pays et non par un intérêt réel pour les Africains eux-mêmes. M. Amzat a posé à son tour les règles pour une bonne entente avec la Chine et avec une Europe qui aurait revu sa copie : dans ses relations avec un pays plus important, tout pays africain doit garder en tête l’intérêt de tout le continent.

Hussein Askary, responsable de l’Institut Schiller pour l’Asie du Sud-ouest, ainsi qu’Abdullatif Elwashali et Aiman Al-Mansor, de l’Association yéménite INSAN pour les droits de l’homme et pour la paix, se sont concentrés sur la guerre meurtrière menée contre le Yémen par la coalition saoudienne, avec le soutien officiel des Etats-Unis et du Royaume-Uni, et celui, caché, de la France. Après que les représentants yéménites eurent décrit la situation humanitaire catastrophique qui sévit dans ce pays, Hussein Askary présenta le nouveau dossier de l’Institut, Opération Félix pour la reconstruction du Yémen. Son objectif n’est pas de revenir à l’état dans lequel le pays se trouvait avant la guerre, mais de lui fournir, au contraire, une plateforme technologique pour devenir une nation prospère coopérant avec le projet de Nouvelles Routes de la soie.

Allemagne, Balkans et Asie centrale

Une quatrième table ronde très riche a clos la conférence, évoquant les vastes perspectives ouvertes par le projet chinois dans les Balkans. Elke Fimmen, de l’Institut Schiller-Allemagne, a présenté le dernier rapport de l’Institut sur cette question, suivie par le député bulgare Ivo Christov, l’économiste hétérodoxe Folker Hellmeyer, le Pr Duško Dimitrijević, chercheur à l’Institut international d’économie et politique de Belgrade (Serbie), Hans von Helldorff, de l’Association fédérale de l’Initiative Nouvelle Route de la soie allemande, Léonidas Chrysanthopoulos, ancien secrétaire général de l’Organisation de coopération économique de la mer Noire, et le Pr Nuraly Bekturganov, vice-président de l’Académie des sciences naturelles du Kazakhstan.

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