« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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2 décembre 2011
La croisade du président Barack Obama en Asie compromet sérieusement les relations forgées entre la Chine et les Etats-Unis sous l’administration Clinton. Si le ministère chinois des Affaires étrangères a réagi avec retenue aux provocations de « Nérobama », se contentant de souligner la nécessité d’une coopération entre les nations de la région pour maintenir la paix et la stabilité, ce ton modéré est trompeur. Les efforts d’Obama pour créer un nouveau pacte de libre-échange en Asie, regroupant tous les pays sauf la Chine, et plus encore, sa proposition de nouveaux pactes de défense entre les Etats-Unis et leurs alliés dans la région, y compris le stationnement de 2500 marines en Australie, ont dû faire sonner l’alarme à Pékin.
Après discussion avec quelques intellectuels chinois de Pékin, connaissant bien les Etats-Unis, il est clair que la colère et l’inquiétude sont bien plus profondes. Face à la crise économique, nous confia l’un d’entre eux, au lieu d’être au gouvernail, Obama pousse à un conflit avec la Chine en tentant de mettre en place une version asiatique de l’OTAN.
« Obama ne comprend pas la nature des réformes menées chez nous, poursuivit-il. La Chine ressemble un peu plus aux Etats-Unis de jour en jour. Nous avons une économie de marché, le libre-échange, un programme spatial. (…) La Chine essaie de réaliser une version chinoise du rêve américain. Elle ressemble aux Etats-Unis plus que jamais dans le passé. Alors pourquoi cette politique folle ? » Il n’a pas compris que Barack Obama et son gouvernement ne défendent pas les intérêts légitimes de la République américaine, mais ceux de l’empire financier.
Un autre intellectuel estime que la modération de Pékin face au comportement impérieux d’Obama pourrait s’expliquer par le désir de calmer l’opinion publique. Tout le monde a suivi la visite d’Obama en Asie, dit-il. « La situation interne ici n’est pas si stable. L’offensive du Président américain en Asie-Pacifique alimente directement les sentiments nationalistes, qui peuvent déstabiliser notre coopération. Et le gouvernement était soucieux de ne pas conforter les sentiments nationalistes. »
Autre indication de l’opposition grandissante aux Etats-Unis, une tribune parue dans l’International Herald Tribune du 22 novembre, signée William Pfaff, souligne que la politique de Washington vis-à-vis de la Chine « est le genre de chose qui déclenche des guerres mondiales ».
Obama a proclamé « une Pax Americana pour l’Asie – ce qui est absurde. Un tel effort risque de provoquer l’effet contraire : un engagement de plus en plus profond et coûteux pour supprimer la tentative chinoise de retrouver la prééminence qui fut la sienne pendant plus de mille ans. »
Obama estime que les Etats-Unis doivent rester une puissance permanente dans la région. C’est ainsi qu’il a déclaré : « Dans l’Asie-Pacifique au XXIe siècle, les Etats-Unis seront pleinement présents. » Commentaire de Pfaff : « Sommes-nous si sûrs, nous autres Américains, que nous voulons être pleinement présents ? Présents où, d’ailleurs ? Dans une guerre à propos des prétentions de la Chine sur Taïwan ou la mer de Chine méridionale ? Ou, ce qui pourrait arriver, dans une Chine transformée en ruines par un bouleversement révolutionnaire ? Ou bien, Obama et l’élite à Washington cherchent-ils plutôt à détourner l’attention de leurs propres troubles révolutionnaires ? »