« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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Conférence internationale de Strasbourg - 8 et 9 juillet 2023
3ème session
12 août 2023
S.E.M. Donald Ramotar, homme politique, syndicaliste, ancien président du Guyana (2011-2015)
Camarades et amis, j’adresse mes salutations fraternelles à tous les participants à cette conférence qui cherche comment mettre fin à la guerre en Europe et empêcher de toute urgence qu’elle ne dégénère en guerre nucléaire.
Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il s’agit d’une des périodes les plus dangereuses, si ce n’est la plus dangereuse, à laquelle notre monde est confronté. Tout le monde s’accorde à dire qu’elle est encore plus grave que la crise des missiles de Cuba de 1962.
Il convient de rappeler que les deux guerres mondiales qui se sont déroulées au siècle dernier ont eu pour origine l’Europe. C’est pourquoi tout conflit en Europe doit être considéré comme un danger mondial majeur.
À l’origine de ces deux guerres, il y a la lutte entre les principales puissances coloniales pour rediviser le monde et redistribuer les colonies existantes. Les populations de ce que l’on appelle aujourd’hui le Sud n’avaient pas voix au chapitre. Les pays d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine et des Caraïbes étaient pour la plupart des colonies ou des semi-colonies. Nous étions considérés comme un objet d’exploitation.
Aujourd’hui, la véritable cause de la guerre est le désir des États impérialistes, ceux qui sont alignés au sein de l’OTAN, d’écraser le ou les pays qui refusent de se plier à leurs diktats. Parmi ces États, les États-Unis d’Amérique, le plus puissant de ce groupe.
Les États-Unis ont utilisé leur puissance économique et militaire pour exploiter les peuples du monde. Leurs relations avec le Sud sont fondées sur une perspective néocoloniale.
Il est essentiel de distinguer le rôle central des États-Unis dans la création des dangers auxquels nous sommes confrontés, de celui des autres alliés en Europe. Il en est ainsi parce que même les relations au sein de l’alliance de l’OTAN sont inégales. En effet, j’ai souvent l’impression que les dirigeants européens ont laissé leurs pays devenir des semi-colonies des États-Unis.
Comment expliquer autrement le rôle que beaucoup d’entre eux jouent aujourd’hui dans le soutien à la guerre par procuration menée par les États-Unis contre la Russie ? Presque toutes les positions qu’ils ont prises sont contraires aux intérêts de leurs populations. Non seulement cela crée plus de pauvreté parmi les classes inférieures de la société, mais même la bourgeoisie européenne est maintenant sérieusement affectée. Pourtant, les gouvernements européens continuent de se plier aux exigences des États-Unis.
C’est pourquoi votre travail est très important. Nous devons nous efforcer d’élever la conscience des masses européennes pour contrer la mollesse de leurs gouvernements. C’est la chose la plus urgente et la plus nécessaire en ce moment.
Il est clair pour moi que nous avons besoin du soutien du Sud dans cette période. Contrairement au siècle dernier où nous n’avions pas notre mot à dire, nous sommes aujourd’hui des États indépendants. On l’a vu lors du vote sur la question de l’Ukraine en 2022 et dans d’autres forums où les États-Unis se sont sentis menacés dans leurs intérêts. Cependant, nous constatons aujourd’hui une nouvelle détermination de la part des pays du Sud. Les dirigeants africains jouent désormais un rôle de plus en plus important dans les relations internationales. Les dirigeants africains prennent des initiatives indépendantes concernant la guerre et la nécessité d’une coopération plus étroite. En Amérique latine, le président brésilien Lula a proposé des mesures concrètes pour mettre fin à la guerre en Ukraine. De plus en plus de dirigeants du Sud défendent leurs droits et résistent au diktat des forces de l’OTAN. Cela reflète la reconnaissance, dans le Sud, que nous ne resterons pas les bras croisés pendant que l’OTAN tente de prendre le contrôle du monde, même au prix d’un éventuel conflit nucléaire avec la Russie.
Le Sud planétaire et les peuples européens ont beaucoup d’intérêts en commun. Nous devons soutenir les nouvelles tendances qui sont apparues sur la scène mondiale et qui ont été accélérées par les sanctions imposées par les États de l’OTAN à la Russie et à d’autres pays.
Cette lutte contre les sanctions conduit à la démocratisation du commerce international et pourrait alléger l’énorme fardeau que nous, les pays du Sud, devons supporter. Cela aiderait également l’Europe à se libérer des griffes des Etats-Unis et permettrait de restaurer une partie de son indépendance, prise par les Etats-Unis dans la période d’après-guerre.
Cependant, chers amis, il est important pour nous d’essayer de construire des alliances afin de faire campagne pour la fin des armes nucléaires, en premier lieu, et pour le désarmement général comme objectif ultime. Nous ne pouvons pas continuer à nous préparer à la guerre en pensant que nous aurons la paix.
Camarades, permettez-moi de dire que, même si nous le souhaitons, la paix ne sera jamais permanente tant que la pauvreté, l’injustice et les relations inégales subsisteront au sein des nations et entre elles. La guerre persistera tant que les cercles dirigeants du Nord considéreront le Sud comme un objet d’exploitation.
La lutte contre les fléaux mentionnés ci-dessus est directement liée à la lutte pour la paix dans le monde.
Nous devons faire entendre notre voix. Nous devons mobiliser et organiser notre lutte et lui donner une orientation. C’est ce dont nous avons tant besoin aujourd’hui.
C’est pourquoi, en conclusion, permettez-moi d’exprimer l’espoir que cette conférence apportera une contribution importante à la lutte contre la pauvreté et la guerre, et qu’elle favorisera la paix entre tous nos peuples.
Je vous remercie !