« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
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16 mars 2022
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La guerre économique contre la Russie déclenchée ces dernières semaines était à l’ordre du jour bien avant la crise actuelle en Ukraine, comme l’ont confirmé des responsables « anonymes » de la Maison Blanche le 25 janvier. Leur déclaration a confirmé la ferme conviction du président Poutine que la Russie ferait l’objet de sanctions sévères, quelle que soit la voie qu’il emprunterait pour traiter avec l’Ukraine.
Mais alors qu’un certain nombre d’Américains s’auto-congratulent avec arrogance quant aux dommages causés et que le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a averti le responsable chinois Yang Jiechi, lors d’une réunion à Rome le 14 mars, que la Chine s’exposerait à des sanctions tout aussi sévères si elle aidait la Russie, il ne faut pas négliger le rôle joué par la Grande-Bretagne dans la confrontation avec la Russie et la Chine. Après tout, l’Empire britannique est engagé dans une guerre économique depuis des siècles, depuis le rôle des malthusiens néolibéraux de la Compagnie britannique des Indes orientales, et le rôle qu’ils ont joué dans la mort de plusieurs millions d’Irlandais lors de la famine de la pomme de terre entre 1845 et 1852, et les vagues de famines qui ont balayé l’Inde du 18e au 20e siècle, avec des dizaines de millions de morts.
Les outils utilisés peuvent être différents, mais l’intention est la même : contenir la menace potentielle que représentent les États-nations souverains pour les opérations de pillage mortelles menées par l’oligarchie financière de la City de Londres. Et si le Royaume-Uni n’a pas aujourd’hui le pouvoir de diriger unilatéralement l’ordre de l’après-guerre froide, les États-Unis servent d’exécuteur militaire principal du nouvel empire, opérant sous la direction de cartels transatlantiques de banques, d’assurances et d’autres sociétés imbriquées.
Le visage hideux de cette nouvelle politique malthusienne est celui de la ministre des Affaires étrangères Liz Truss. Lors d’un discours prononcé le 10 mars devant l’Atlantic Council, un groupe de réflexion anglo-américain financé par des cartels d’entreprises, elle a expliqué comment la guerre actuelle contre la Russie peut être utilisée pour élaborer une nouvelle architecture impériale de sécurité mondiale et une nouvelle structure économique. Elle a qualifié la crise en Ukraine de « changement de paradigme à l’échelle du 11 septembre, et la façon dont nous réagissons aujourd’hui définira le modèle de cette nouvelle ère ». Nous ne pouvons tout simplement pas permettre à « l’expansionnisme de Poutine » de ne pas être remis en cause, a-t-elle déclaré, ajoutant que nous « n’en faisons toujours pas assez ». « Nous voulons une situation dans laquelle ils [les Russes] ne peuvent pas accéder à leurs fonds, ne peuvent pas effectuer leurs paiements, où leurs échanges commerciaux ne peuvent pas circuler, leurs navires ne peuvent pas accoster et leurs avions ne peuvent pas atterrir..... Et nous devons faire plus pour livrer des armes défensives.... Nous ferons tout cela et nous façonnerons cette nouvelle ère mondiale pour la sécurité globale. »
La veille, l’éminence grise des sanctions à l’Atlantic Council, Daniel Fried, avait coécrit un article intitulé « Que reste-t-il à sanctionner en Russie ? Portefeuilles, actions et investissements étrangers ». Fried, qui a rédigé les sanctions initiales contre la Russie liées à la révolution de couleur de 2014 pour le compote de l’administration Obama, conclut que la suppression ou la suspension des sanctions après la fin de la guerre serait « complexe », car les promesses de Poutine « ne sont tout simplement pas dignes de confiance ». En d’autres termes, dans un monde dominé par la vision de l’empire anglo-américain, il n’est pas question que la Russie ait droit à se développer en tant que nation souveraine, et « l’on » veillera, avec un régime permanent de sanctions, à ce que cela ne se produise pas !