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17 octobre 2013
« Hors bilan » est le terme utilisé pour désigner les opérations financières, notamment les produits dérivés, qui n’apparaissent pas dans le bilan des banques. Elles constituent la majeure partie des opérations spéculatives, mais nul ne peut les quantifier exactement puisque, justement, elles ne sont pas comptabilisées dans les bilans. On estime toutefois qu’elles se montent à des millions de milliards de dollars et qu’elles sont incontrôlables.
Récemment, l’UE a décidé d’autoriser les Etats à appliquer le même principe en matière du renflouement des banques, à savoir que l’argent ainsi utilisé ne figure pas dans le budget. La plupart des gouvernements dans le monde sont déjà surendettés suite à la première vague de renflouements bancaires en 2008 et ont donc épuisé leur capacité à renflouer davantage. C’est pourquoi l’UE a introduit le bail-in en cas de faillite bancaire, c’est-à-dire la confiscation des dépôts des clients pour rembourser la dette contractée par les spéculateurs. Mais comme ce mécanisme de bail-in (Mécanisme unique de résolution) n’est pas encore en place et que la prochaine crise est imminente, Bruxelles a opté pour le « renflouement hors bilan ».
Ce projet, annoncé dans une lettre du 9 octobre du commissaire européen Olli Rehn aux ministres des Finances de l’UE, est scandaleux à plusieurs titres. D’abord, il autorise la violation des règles de l’UE sur le déficit, tout en les maintenant pour les dépenses destinées aux populations.
Ensuite, la justification avancée est que l’aide aux banques n’est qu’une mesure « ponctuelle », c’est-à-dire qu’elle ne sera pas répétée, et peut à ce titre être exclue du déficit. Comme si les investissements publics n’étaient pas des mesures ponctuelles !
Le « renflouement hors budget » n’exclut pas un bail-in. Au contraire, c’est un préalable : les banques recevant de l’argent de l’Etat doivent faire en sorte que les actionnaires et les créanciers obligataires contribuent aussi. Cela avait déjà été fait pour la banque Monte dei Paschi di Siena (MPS) le mois dernier sur ordre du commissaire européen Almunia.
La lettre de Rehn stipule en outre une condition perverse : seuls les pays ayant une dette inférieure à 60 % de leur PIB peuvent éviter une « procédure de déficit excessif », c’est-à-dire une action et éventuellement des sanctions lancées par la Commission européenne contre tout Etat membre qui dépasse le plafond du déficit budgétaire imposé par le Pacte de stabilité. Autrement dit, ils n’échapperont à une telle procédure qu’à la condition que leur déficit reste inférieur à 3 %. Il ne leur reste donc plus qu’à couper les dépenses publiques (santé, éducation, retraites et sécurité).
Voici ce que dit la lettre de Rehn : « Selon le Pacte de croissance et de stabilité, les injections publiques de capitaux [uniquement pour les banques] sont, de manière générale, regardées comme des mesures temporaires ponctuelles et par conséquent comme des facteurs relatifs à la stabilité financière, ce qui signifie quils ne doivent pas être retenus contre les Etats membres dans le contexte de la procédure pour déficit excessif. »