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21 décembre 2016
Selon certaines estimations, le système bancaire chinois aurait consacré 20 000 milliards de dollars de crédits à l’expansion économique depuis 2008, tout en minimisant l’exposition aux produits dérivés – contrairement aux banques dites « trop grosses pour faire faillite » dans le monde transatlantique. À cela, il y une bonne raison : la Chine avait adopté en 1993, par effet de loi, la séparation des banques de dépôt de celles de marché suivant le modèle de la loi Glass-Steagall.
En 2012, selon la Banque des Règlements internationaux, l’exposition bancaire aux produits dérivés ne représentait que 1400 milliards de dollars, soit 0,33% du total mondial. L’exposition ayant augmenté quelque peu depuis, le gouvernement se propose d’encadrer encore plus strictement l’échange de produits dérivés par les banques commerciales.
Ainsi, le 28 novembre, la Commission de régulation bancaire (CBRC) a diffusé les nouvelles règles proposées qui sont, selon Xinhua, beaucoup plus contraignantes pour ce qui est du calcul de l’exposition aux risques de contrepartie, tant pour les options / contrats à terme négociés en bourse que pour les contrats dérivés hors-cote sur les taux d’intérêt, etc. Toujours selon Xinhua, les nouvelles règles augmentent aussi la quantité de fonds propres nécessaires pour s’engager dans les dérivés, et définissent des normes claires sur les facteurs de risque prioritaires, et dans quelles circonstances. Le tout doit donc réduire la marge d’ambiguïté dont ont su profiter certaines banques pour sous-estimer le risque encouru.
Dans un livre paru en 2010, l’ancien président-adjoint de la Banque populaire de Chine Li Gang, décrivait le débat à l’époque sur la séparation des banques. Au début de la réforme en 1991-1992, la Chine avait opté pour le modèle de banque universelle, permettant ainsi à une banque de dépôt d’exercer aussi l’activité de courtier d’assurances. Mais dès juin 1993, face à la « surchauffe » et au « chaos financier », les autorités ont « conclu que les opérations mixtes y avaient une part de responsabilité », et ont décidé de s’inspirer de l’expérience américaine de séparation bancaire.
Plus d’une décennie plus tard, Li Gang lui-même et d’autres économistes envisageaient de rétablir le modèle de banque universelle – jusqu’à ce que le krach d’août 2007 règle la question en faveur du principe du Glass-Steagall. Le Bureau d’information du Conseil d’État chinois a publié le 1er décembre un Livre blanc qui illustre bien le succès du modèle chinois en termes de son développement économique et social.
L’Occident malheureusement n’a pas fait preuve de la même sagesse : aujourd’hui, l’exposition aux produits dérivés de JPMorgan et de Deutsche Bank dépasse la barre de 50 000 milliards de dollars (!), soit environ 20 % du total, et celle de Citigroup et de Bank of America n’en est pas loin. Quant aux populations des pays de la région transatlantique, elles subissent aujourd’hui une régression économique et sociale sans précédent depuis le rétablissement de la séparation bancaire d’après guerre.
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