« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller
Accueil > Veille stratégique
7 octobre 2022
Pour la commissaire européenne à l’Energie, Kadri Simson (Estonie) : l’hiver prochain sera bien pire que celui-ci. Les ministres de l’Energie de l’Union européenne se sont réunis le 30 septembre pour discuter de la montée en flèche des prix de l’énergie en Europe et proposer des mesures d’urgence. À l’issue de la réunion, la commissaire européenne à l’énergie, a déclaré à la presse : « Les ministres étaient inquiets, tout comme moi, du fait que cet hiver ne sera pas facile pour nous, et que le prochain sera encore plus difficile. »
Pour autant, aucun accord n’a été conclut sur le plafonnement du prix de gros du gaz naturel, l’une des principales revendications qu’un groupe de 15 États membres avaient soumises à la Commission avant la réunion. Et si tous veulent bien tenter de limiter les profits mirobolants encaissés par les entreprises de combustibles fossiles, cela ne veut pas dire grand-chose dans un royaume où la spéculation et le marché sont rois.
Un certain nombre de pays membres de l’UE, dont l’Allemagne, l’Autriche et les Pays-Bas, refusent tout plafonnement des prix, et la Commission européenne a fait valoir qu’une telle mesure compromettrait l’approvisionnement de l’UE sur le marché mondial. La ministre autrichienne de l’Énergie, Leonore Gewessler, a expliqué que son gouvernement ne pouvait pas soutenir un plafonnement des prix pour des raisons de sécurité énergétique. « L’Autriche est dépendante des importations de gaz naturel et des importations de gaz de Russie, a-t-elle déclaré. Dans toutes ces propositions, je n’ai vu aucune certitude que nos partenaires fournisseurs continueraient à livrer suffisamment de gaz à l’Europe si nous ne sommes pas prêts à payer le prix demandé. »
Côté allemand, le ministre de l’Économie et de l’Énergie, Robert Habeck (des Verts), invoque le même argument, exprimant à ses homologues à Bruxelles la crainte que les exportateurs boudent tout simplement l’Europe en cas de plafonnement des prix.
A cette occasion, la question de la fermeture du marché à terme du gaz naturel à Amsterdam (le TTF) a encore une fois été esquivée alors que c’est pourtant la seule mesure qui permettrait de contrôler les prix de l’énergie.
De son côté, Berlin choisit le renflouement. Fermement opposé à un contrôle du prix du gaz à l’échelle de l’UE, le gouvernement allemand a décidé de faire cavalier seul pour contrer l’inflation galopante. Ainsi, le chancelier Scholz a annoncé le 29 septembre que le gouvernement allait débloquer la somme fastueuse de 200 milliards d’euros pour aider les ménages et les entreprises à payer leurs factures d’énergie. Peu avant, au Royaume-Uni, le nouveau gouvernement de la Première ministre Liz Truss avait annoncé de son côté son intention de lancer un emprunt colossal pour subventionner les prix de l’énergie.
Or, ces nouvelles formes d’assouplissement quantitatif ne feront nullement baisser les prix. C’est simplement le gouvernement qui prendra en charge la facture exorbitante de l’énergie des entreprises et des ménages, créant une forte demande et, partant, des prix encore plus élevés. Ainsi, les divers fonds spéculatifs, et au bout du compte les banques, seront renfloués - au moins provisoirement - avec l’argent des contribuables.
Le plan allemand est très mal accueilli par les pays membres de l’UE qui n’ont pas les moyens financiers de lancer des « paquets d’aide » similaires (bien souvent parce que leurs finances publiques ont été dépouillées sur l’ordre de Bruxelles) et ils accusent Berlin de ne se préoccuper que de ses propres intérêts.