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Deutsche Bank, ou la partie émergée du krach

18 octobre 2016

Sur la réunion annuelle du FMI (du 7 au 9 octobre) planait le spectre du krach systémique, ponctué par le « flash crash » de la livre sterling et les craintes de contagion à partir des crises de Deutsche Bank et de Monte dei Paschi di Siena (MPS). Chacun sait que ce krach est inévitable, mais les autorités financières, loin d’envisager une séparation bancaire de type Glass-Steagall, complotent de nouvelles mesures de bail-in et de spoliation des déposants.

Les « liquidités fantômes »

En deux minutes, à l’aube du 7 octobre, la livre sterling a perdu 6 % de sa valeur. Au-delà des habituelles explications (le Brexit, l’automatisation de ventes, voire « un gros doigt »), la seule cause est la volatilité intrinsèque au système provenant de ce que Bank of America vient d’appeler les « liquidités fantômes ». Cela veut dire que tous les actifs financiers classés comme liquides sont en réalité surévalués. Ainsi, si quelqu’un cherche à vendre des actifs, il découvrira soudain que personne n’en veut, et le prix de ces actifs plongera plus rapidement qu’il ne le faut pour crier « vendez ».

En fait, nous nous trouvons dans cette phase de krach avancée de l’année au moment de l’effondrement des prix des matières premières, notamment le pétrole et le gaz de schiste. Avec des mois d’expansion monétaire et de taux négatifs, les banques centrales ont retardé le krach, mais au prix de l’amplification de sa gravité et son impact.

Solution de marché

Pour l’heure, banques centrales et gouvernements s’empressent de trouver une « solution de marché » à la crise bancaire, centrée autour de Deutsche Bank et de Monte dei Paschi di Siena (MPS). La dernière combine en date consiste à convaincre un groupe de sociétés allemandes du DAX de venir à leur rescousse en souscrivant une augmentation de capital, avec ou sans l’aide des Qataris, les principaux actionnaires de la banque. Or, comme l’indiquait le quotidien Die Welt du 4 octobre, cette combine dépend du résultat au jeu de poker entre Washington et la Deutsche.

La DB tente en effet d’obtenir du département américain de la Justice une réduction significative de l’amende de 14 milliards de dollars que celui-ci lui a infligée, sous peine de se faire le déclencheur d’un krach systémique s’il refuse.

Die Welt a publié deux tableaux éloquents : l’un montre les investissements de banques étrangères dans leurs consœurs allemandes (mille milliards d’euros au total), l’autre les produits dérivés transfrontaliers : les banques allemandes arrivent en tête, suivies de peu par les anglaises. Die Welt constate alors :

Le ministère de la Justice américain ne peut imposer une amende trop lourde, sauf à risquer une nouvelle crise bancaire aux États-Unis.

Même à supposer que le PDG de la Deutsche, John Cryan, gagne son pari, aucune solution de type bail-out / bail-in ne saurait marcher sans que la banque ne change complètement de modèle. Les 42 milliards d’euros de produits dérivés dans le bilan de la DB sont une bombe à retardement, et le temps passe vite.

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