« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller

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#1 - La Sonate pathétique de Beethoven

en 3 parties

14 novembre 2020

note de Fred Haight

Première partie : pourquoi cette sonate est-elle appelée « Pathétique » ?

L’électrisante Sonate pour piano n° 8 en do mineur, op.13 de Beethoven, connue sous le nom de « Pathétique », a été composée en 1798, alors qu’il avait 28 ans. Elle a ébranlé le monde musical. Rien de tel n’avait jamais été entendu. Aujourd’hui, nous l’écoutons souvent de manière passive, comme si elle était ancienne. Mettez-vous à la place de quelqu’un qui l’entend pour la première fois, et imaginez le choc qu’il a ressenti.

Bien que ce soit son éditeur qui ait choisi de l’appeler« Grande sonate pathétique », Beethoven a approuvé le titre ! Pourquoi approuverait-il que son œuvre soit qualifiée de pathétique ? Peut-être que le mot avait un sens différent à l’époque de celui qu’il a aujourd’hui. Tout au long de cette série, nous verrons comment les âmes sœurs de Beethoven et du grand poète Friedrich Schiller ont collaboré, bien qu’elles ne se soient jamais rencontrées. Nous devons consulter Schiller afin de comprendre ce que pathétique signifie réellement.

Dans son essai, « Du pathétique », Schiller a écrit

La peinture de la souffrance (pathos), en tant que simple souffrance, n’est jamais le but de l’art ; mais, comme moyen pour d’atteindre à son but, elle est pour lui de la dernière importance. La fin suprême de l’art de l’art, c’est de représenter le supra-sensible, et c’est ce que fait pour nous l’art tragique en particulier, parce qu’il représente, par des traits sensibles, l’homme moral se maintenant, dans l’état de passion, indépendant des lois de la nature.
 
Or, la résistance ne peut s’apprécier que d’après la force de l’attaque. Il faut donc, pour que l’intelligence dans l’homme, se révèle comme une force indépendante de la nature, que la nature ait d’abord déployé devant nos yeux toute sa puissance. (...)
 
Il n’y a point de mérite à maîtriser des sentiments qui ne font qu’effleurer légèrement et passagèrement la surface de l’âme : mais pour résister à une tempête qui soulève toute la nature sensible, et pour y conserver la liberté de son âme, il faut une faculté de résistance, infiniment à toute force de la nature.

Ainsi, la sonate Pathétique ne naît pas d’une souffrance personnelle et ne veut pas non plus nous faire plaindre l’individu qui souffre - un sentiment qui, aussi sincère soit-il, ne peut rien changer. Elle nous montre plutôt la possibilité de provoquer un changement, en faisant appel à quelque chose de profond, qui nous rassemble : « prendre les armes contre une mer de problèmes, et en s’opposant, y mettre fin ».

Nous vous proposons ici un enregistrement du premier mouvement interprèté par feu Claudio Arrau, qui a su ne pas céder à l’attirance d’un tempo trop rapide. Nous aborderons l’aspect scientifique, dans le prochain épisode.

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