« la plus parfaite de toutes les oeuvres d’art est l’édification d’une vraie liberté politique » Friedrich Schiller

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Bouleversement du système politique allemand à l’horizon

20 juin 2018

Qu’il ait fallu cinq mois aux principaux partis politiques allemands pour former un nouveau gouvernement après les élections nationales de septembre 2017, est le signe de la transformation qui s’opère au sein de la classe politique. Vu la nature féroce des intrigues et des guerres intestines déchirant ces partis, avant et après le scrutin, l’aboutissement du processus reste une inconnue. La montée de la « très populiste » (pour ne pas dire xénophobe) Alliance pour l’Allemagne (AFD), passée en peu de temps à la troisième place de l’échiquier politique, est une véritable cause de préoccupation.
 
Le désaccord entre la CDU et la CSU sur la question des migrants est si âpre qu’il pourrait remettre en question, pour la première fois, l’alliance qui unit ces deux partis conservateurs depuis 1976. Preuve en est que le gouvernement de l’Etat de la Bavière, dirigé par la CSU, et le gouvernement autrichien, qui partagent certains points de vue sur la question des migrants, organisent le 20 juin dans la ville autrichienne de Linz une « session conjointe de cabinets » , pour protester contre la ligne de la chancelière Merkel.
 
Malheureusement, aussi bien la CDU d’Angela Merkel que la CSU, dirigée par l’actuel ministre de l’Intérieur Horst Seehofer, (épaulée par des dissidents de la CDU), sont obsédés par deux variantes de la même approche, consistant à « protéger les frontières », dont aucune n’offre de solution au problème. Depuis le début de la crise des réfugiés en 2015, on a beaucoup parlé en Europe d’un « Plan Marshall pour l’Afrique », mais rien de concret n’a suivi. L’Union européenne refuse même de participer à un plan de reconstruction de la Syrie après la guerre, alors que c’est de ce pays que viennent pas moins de 600 000 réfugiés entrés en Allemagne en 2015.
 
La montée de l’AFD n’est pas le seul signe avant-coureur des bouleversements à venir dans le paysage politique allemand. Certains à gauche aussi songent à créer une nouvelle alliance, bien que ce ne soit qu’au stade préliminaire. Inspirée par le Parti travailliste anglais de Jeremy Corbyn, l’une des grandes dirigeantes du Parti de Gauche (Die Linke), Sahra Wagenknecht, tâte le terrain en vue d’un mouvement pouvant attirer l’aile gauche du SPD, mais aussi une large frange de l’électorat qui a tourné le dos aux grands partis et boycotté les récentes élections. Un sondage INSA de la semaine dernière donnait un surprenant 25 % d’opinions favorables à une telle alliance dirigée par Wagenknecht, ce qui ferait d’elle la principale concurrente d’Angela Merkel à l’échelle nationale.
 
Autre aspect intéressant de Mme Wagenknecht, qui est aussi la co-présidente de Die Linke au Bundestag, elle prône une approche plutôt sobre à l’égard de la présidence Trump. Comme lui, elle est favorable au retour de la Russie au sein du G7 et à la levée des sanctions. Elle dénonce aussi les guerres occidentales de « changement de régime » comme étant la cause principale des flux de réfugiés. Une vision des choses qui trouve une résonance de plus en plus forte dans l’opinion allemande.

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